Avec sa nouvelle politique visant à encadrer la présence des automobiles sans conducteur sur les routes, le département américain du Transport vient de donner un sérieux coup d'accélérateur au développement de ces véhicules. Le Québec ne doit pas rater ce virage.

« Cela pourrait s'avérer la plus grande révolution dans le transport personnel depuis la popularisation de l'automobile il y a près d'un siècle », écrit le Department of Transportation (DOT) dans sa politique publiée mardi dernier.

Le titre (Accélérer la prochaine révolution en matière de sécurité routière) et l'illustration (un véhicule dont les deux sièges avant tournent le dos à un tableau de bord dépourvu de volant) donnent le ton. Washington ne cherche pas à freiner cette nouvelle génération de véhicules mais, au contraire, à faciliter leur développement.

 

Si l'idée d'une voiture n'ayant pas besoin de chauffeur fait rêver, elle en inquiète aussi plusieurs. La conduite automobile est une activité complexe, les accrochages sont souvent évités de justesse. Comment les véhicules autonomes se comporteront-ils dans de telles situations ?

Rappelant que 94 % des collisions sont dues à une erreur ou à une décision humaine, le DOT y voit plutôt une occasion de rendre les routes plus sécuritaires. Il veut donc que les véhicules puissent circuler d'un État à l'autre, et même au-delà. « La National Highway Traffic Safety Administration examinera la possibilité de créer une cohérence transfrontalière en invitant les autorités canadiennes et mexicaines à s'inspirer de cette politique », indique le document.

C'est le temps de se positionner, sinon il faudra se contenter des sièges passagers.

Déjà. Ford et Volkswagen promettent des véhicules entièrement autonomes pour les services d'autopartage d'ici cinq ans. Plusieurs États américains, dont la Floride, le Michigan, le Nevada, la Pennsylvanie et la Californie, ont adopté des règlements pour encadrer les essais routiers. L'Ontario a aussi fait un appel de projets pilotes et la municipalité de Stratford a levé la main. À l'autre bout du pays, une firme de capital de risque demande que les voies de covoiturage entre Vancouver et Seattle s'ouvrent aux autos sans conducteur.

Le Michigan et l'Ontario savent que l'avenir de leur industrie automobile passe par là. Il n'est toutefois pas nécessaire d'être un constructeur établi pour aller de l'avant. Des entreprises comme Tesla et Alphabet, la société mère de Google, comptent bien rafler une part de ce nouveau marché. Les mutations sont propices au brassage de cartes, il faut savoir en profiter. C'est ce qu'a fait Apple avec iTunes et Apple Music, qui lui ont permis d'entrer, puis de s'imposer, dans la distribution musicale.

Le fait que le Québec n'ait pas, comme son voisin ontarien, de grandes usines d'assemblage, n'est donc pas un empêchement. L'Institut du véhicule innovant de Saint-Jérôme a d'ailleurs investi un créneau original, celui des véhicules hors route électriques ou hybrides. Son programme ARION, qui compte une quinzaine de partenaires, dont plusieurs entreprises, vise à développer des véhicules pour les secteurs agricole et industriel, ainsi que des navettes pour circuler dans des environnements privés (campus universitaire, aéroport, etc.).

Montréal veut aussi créer un corridor d'essai pour le transport électrique et intelligent. Ce corridor, qui couvrira le centre des affaires, le Vieux-Montréal et le Quartier de l'innovation, offrira aux manufacturiers des conditions favorables pour tester leurs nouvelles technologies en situation réelle, indique-t-on à la Ville.

C'est un début.

Les véhicules autonomes sont un enjeu de technologie plus que de carrosserie. Et sur ce plan, nous sommes loin d'être dépourvus. La région métropolitaine de Montréal recèle la plus haute concentration de professionnels des technologies au pays, et plus de la moitié de ces emplois sont reliés aux technologies de l'information et des communications, montre un classement récent.

Profitons-en : des occasions comme celle-là, il n'en passe pas souvent.

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