Le ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation (MAPAQ) a fait un premier pas intéressant en mettant les consommateurs au coeur de son nouveau plan stratégique. Le secteur agroalimentaire pourrait cependant contribuer de façon beaucoup plus importante à l'économie québécoise. Mais pour ça, il faut le vouloir et prendre les moyens.

Le souci du consommateur et du citoyen est omniprésent dans le nouveau plan stratégique du MAPAQ. C'est une bonne chose, car le Québec demeure un marché incontournable pour beaucoup de producteurs et de transformateurs. Ils ont tout intérêt à offrir des aliments qui répondent aux désirs de la clientèle et à les produire dans des conditions acceptables aux yeux de la population.

Toutefois, producteurs et transformateurs restent sur leur faim.

Les aides à la recherche et aux services-conseils ainsi que les programmes de sécurité du revenu ont été rognés alors que les exigences envers les producteurs augmentent, fait valoir le directeur général de l'Union des producteurs agricoles (UPA), Charles-Félix Ross. Il déplore aussi que la promotion des aliments du Québec et les régions ne figurent pas dans les priorités de façon aussi explicite qu'auparavant.

Les moyens ne sont pas à la mesure des ambitions exprimées, constate également le vice-président innovation et affaires économiques du Conseil de la transformation alimentaire du Québec (CTAC), Dimitri Fraeys.

On a tendance à l'oublier, mais avec 62 000 emplois et 24 milliards de dollars de revenus, la transformation agroalimentaire est la plus importante activité manufacturière au Québec. Elle a généré une balance commerciale positive la plupart des dix dernières années, et la baisse du dollar canadien donne un élan supplémentaire à ses exportations. Détail non négligeable : ses entreprises achètent presque 70 % de la production agricole québécoise. Bref, voilà un levier sur lequel le Québec aurait intérêt à miser davantage, surtout en cette période où la croissance végète.

Le dernier budget a ajouté 45 millions sur cinq ans pour diverses aides à la transformation et l'agriculture, notamment pour la recherche, l'exportation et les alcools. Le CTAC espère aussi que son secteur pourra bénéficier de la stratégie de soutien au manufacturier innovant dévoilée récemment par la ministre de l'Économie, Dominique Anglade.

Ces coups de pouce seront bienvenus, mais on souhaiterait une vision plus ambitieuse, qui incite le secteur à exploiter son potentiel.

La commande dépasse largement la planification périodique interne du Ministère. Il faudrait une volonté politique étayée de moyens concrets - autrement dit, une véritable stratégie agroalimentaire. C'est ce que l'UPA et le CTAQ ont réclamé de concert à la fin de 2015. Il semble avoir été entendu, puisque le dernier budget Leitao a annoncé « l'élaboration d'une véritable stratégie agroalimentaire québécoise ». Mais depuis, plus rien.

C'est d'autant plus préoccupant que le budget parle surtout d'une « démarche » impliquant consommateurs, producteurs agricoles, pêcheurs, transformateurs, distributeurs et autres partenaires afin de « dégager une vision commune » pouvant servir de base à ladite stratégie. Vraiment ? Le Québec s'est déjà livré à un vaste exercice du genre il y a moins de 10 ans (la Commission Pronovost) et d'autres rapports se sont ajoutés depuis. Il y a moyen de se mettre à jour, et de tenir compte de l'acceptabilité sociale, sans s'enliser dans les interrogations existentielles. Le secteur a besoin d'un plan de développement économique solide, et pas dans trois ans.

Qu'en pensez-vous? Exprimez votre opinion