Enfin, c'est dit. Le déficit du prochain budget fédéral dépassera « très probablement » les 10 milliards de dollars annoncés en campagne, a reconnu le premier ministre Justin Trudeau en rencontre éditoriale à La Presse. Il a plus que jamais intérêt à ce que sa stratégie d'investissement génère la croissance escomptée.

« On commence à s'approcher d'emblée, avec notre situation fiscale actuelle, d'un déficit qui s'approche de 10 milliards. Donc c'est sûr qu'on va ajouter à ce déficit-là. Donc oui, on va dépasser le 10 milliards », a indiqué M. Trudeau.

À la question qui suit naturellement (combien ?), par contre, la porte ne s'est même pas entreouverte. Vous le verrez dans le budget, nous a-t-on répondu en substance.

Il ne faudra donc pas s'étonner de voir les supputations fuser de toutes parts d'ici là. La Banque Nationale Marchés financiers a avancé le chiffre de 90 milliards sur quatre ans, hier. D'autres suivront.

Le montant, bien sûr, n'est pas anodin. Nous l'avons déjà mentionné : même si la population a plutôt bien accepté le principe d'un déficit, cet élastique-là n'est pas extensible à l'infini.

Toutefois, au-delà du chiffre inscrit au prochain budget, c'est la crédibilité du plan annoncé pour le justifier qui sera déterminante.

On en connaît les grandes lignes (réductions d'impôt ciblant la classe moyenne, nouvelle Allocation canadienne aux enfants, investissements majeurs en infrastructures), mais, hormis la première mesure, tout reste à préciser.

La logique se défend. L'argent transféré aux familles de la classe moyenne a de bonnes chances d'être dépensé, ce qui est toujours bienvenu dans une économie reposant à près de 55 % sur la consommation des ménages. Les investissements publics en infrastructures donnent du travail et font rouler l'économie.

Le résultat sera cependant tributaire de plusieurs facteurs. Sur la façon dont les contribuables de la classe moyenne utiliseront leur nouvelle marge de manoeuvre, le gouvernement n'a pas de contrôle. Mais il sera entièrement responsable de ses choix en matière d'infrastructures. Il faut miser sur des projets valables à long terme, et en inclure qui soient prêts à démarrer rapidement.

Le premier ministre, heureusement, semble en être conscient, comme en témoigne son intention d'investir dans les transports collectifs et la réfection d'infrastructures existantes. Reste à voir comment tout cela se déploiera sur le terrain.

Le gouvernement joue son va-tout économique en misant sur un déficit plus important que prévu. Nous avons tous intérêt à ce que ça rapporte, car à part la faiblesse du huard qui nous amène des touristes et redonne un peu d'élan à nos exportations, on ne perçoit aucune étincelle susceptible de raviver la croissance.

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