Confronté au ralentissement brutal de l'économie canadienne, le gouvernement Trudeau se trouve devant un double défi. Présenter un plan d'infrastructure capable de stimuler la croissance rapidement et accentuer le virage vers une plus grande diversification. L'un ne doit pas se faire sans l'autre.

Il est pratiquement acquis que le déficit du premier budget Morneau dépassera le plafond de 10 milliards de dollars annoncé en campagne électorale. Il n'a pas été nécessaire de feindre la surprise propre aux nouvelles administrations (« Incroyable, les coffres sont vides ! »). Chacun se rend bien compte que les ressources pétrolières et gazières ont perdu leur force de traction, que les prix des autres ressources naturelles n'aident rien, et qu'on en a pour un bout.

Les investissements en infrastructure promis par les Libéraux suscitent donc plus d'attentes que jamais.

Même le gouverneur de la Banque du Canada compte là-dessus pour redorer ses prévisions. Le premier budget du ministre des Finances Bill Morneau sera donc déterminant. Il ne s'agit pas seulement d'annoncer la couleur pour la prochaine année, mais de montrer une direction claire. L'engagement, rappelons-le, porte sur 10 ans. On parle de 125 milliards de dollars, soit 60 de plus que ce qu'envisageait le précédent gouvernement.

Le ministre Morneau se rendra-t-il aux arguments de ceux qui le pressent d'accélérer le tempo ? On verra. Même s'il s'en tient aux 17 milliards supplémentaires prévus dans un premier mandat, le désir de susciter de l'activité économique ne doit pas l'emporter sur l'analyse rigoureuse. Les projets prêt-à-pelleter ne sont pas aussi rares qu'on le prétend. La difficulté est de choisir intelligemment. Et dans bien des cas, il serait sans doute plus judicieux de réparer des infrastructures existantes que d'en ajouter de nouvelles vouées à devenir des plaies béantes, faute d'entretien.

Ces premiers chantiers assureront l'intérim, le temps que les exportations, rendues plus attrayantes par la dépréciation de la devise, donnent leur pleine mesure. Il faudrait cependant éviter de retomber dans nos travers passés en misant tout sur la faiblesse du dollar. D'autant que l'environnement a changé depuis le début des années 2000. De nombreuses entreprises manufacturières ont disparu. La concurrence mondiale s'est accentuée. Bref, ce n'est pas parce que le courant est revenu que la machine va repartir à plein régime. Il faut diversifier nos sources de revenus en investissant dans des secteurs d'avenir.

Le premier ministre en semble heureusement conscient. « La croissance et la prospérité ne tiennent pas seulement à ce qui se trouve sous nos pieds, mais surtout à ce que nous avons entre les oreilles », a-t-il déclaré à Davos en évoquant la robotique, les biotechs et une économie à faibles émissions de carbone.

Reste maintenant à identifier des domaines et des projets qui ne sont pas seulement vertueux ou séduisants, mais avec lesquels nous avons de réelles chances de nous démarquer.

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