Il y aura bientôt un an que 32 personnes âgées ont péri dans l'incendie de la Résidence du Havre à L'Isle-Verte. L'enquête publique terminée il y a quelques semaines constitue une première étape, mais les décisions les plus difficiles restent à prendre.

Si les huit jours d'audiences n'ont pas permis d'identifier l'origine du brasier, ils ont écarté une fois pour toutes les soupçons odieux qui pesaient sur l'une des victimes. Le feu n'a pas démarré dans la chambre d'un résidant fumeur, comme le prétendait le gardien de nuit, mais dans la cuisine de l'établissement.

Grâce à l'enquête, on a pu retracer la séquence exacte des événements, dissipant certaines rumeurs et faisant bien voir que dans un tel endroit et dans de telles circonstances, un feu ne pouvait qu'être dramatique.

Oui, si certains intervenants avaient été mieux préparés et avaient mieux réagi, et si des pertes de temps avaient été évitées, plus de locataires auraient sans doute eu la vie sauve. Toutefois, dans ce bâtiment de trois étages qui n'était pas soumis aux normes de sécurité récentes, habité par des personnes très âgées, dont plusieurs à mobilité réduite, à une heure où tous dormaient et avec de forts vents qui ont accéléré la combustion, le nombre de victimes ne pouvait qu'être élevé.

Attendons de voir les recommandations du coroner. Cependant, il ne faut pas se leurrer: corriger les problèmes constatés à L'Isle-Verte dans l'ensemble de la province nous placera devant des choix difficiles. Car derrière plusieurs des lacunes révélées lors de l'enquête, il y a des questions d'argent. Former des pompiers volontaires coûte cher. Avoir plus de personnel ou installer des gicleurs et d'autres dispositifs de sécurité aussi. Même convoquer son gardien de nuit à un exercice d'évacuation de jour a un coût. Faut-il s'étonner qu'un village ou une résidence privée s'évitent de telles dépenses lorsque celles-ci ne sont pas obligatoires?

La nouvelle subvention de 19,5 millions pour la formation des pompiers à temps partiel aidera à relever le niveau. Cependant, il faudrait aussi abolir l'exemption de mise à jour pour les pompiers certifiés avant 1998.

Le nouveau Code de construction devrait mettre un terme à l'ouverture de nouvelles résidences pour personnes âgées (RPA) sans gicleurs, à l'exception des plus petites. Le problème des immeubles existants, par contre, reste entier.

Le risque de voir des résidences fermer ou changer de vocation si on leur impose de nouvelles exigences est bien réel: une centaine l'ont fait l'an dernier. Forcer des gens très âgés à déménager, parfois loin de leur famille, n'est pas une bonne idée. Les laisser dans un édifice dont elles n'ont pratiquement aucune chance de s'échapper en cas d'incendie n'est pas plus acceptable.

Cette situation embarrassante, nous l'avons collectivement ignorée aussi longtemps que possible. Depuis L'Isle-Verte, ce n'est plus une option. Il va falloir trouver des solutions humainement et économiquement viables.

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