Revenu Québec accorde de généreux crédits d'impôt sur la base de relevés émis par des garderies illégales. Le ministère de la Famille, de son côté, est privé des renseignements fiscaux qui l'aideraient dans la chasse aux contrevenants. Québec doit permettre à ces deux entités d'échanger l'information dont elles ont besoin.

Le ministère de la Famille a débusqué plus de 200 garderies illégales par an au cours des deux dernières années, a révélé notre collègue Tommy Chouinard hier. Des endroits qui accueillent plus de six enfants sans permis, ou qui dépassent le nombre d'enfants autorisés par leur permis.

Les inspecteurs en trouveraient bien davantage s'ils avaient la liste de tous ceux qui remettent des relevés d'impôt pour services de garde non subventionnés. Revenu Québec, qui voit passer ces relevés, serait bien placé pour en fournir la liste. Malheureusement, la Loi sur l'administration fiscale l'en empêche. Qu'attend-on pour la modifier?

Ce serait d'autant plus utile que le ministère de la Famille, en échange, pourrait transmettre sa liste de garderies illégales à Revenu Québec. L'agence pourrait ainsi refuser leurs relevés, et cesser de les soutenir avec des fonds publics.

Voilà un cas flagrant où la main gauche ignore ce que fait la main droite. Le ministère de la Famille et l'agence du Revenu appliquant des lois différentes, on se retrouve dans une situation absurde où une garderie considérée comme illégale par le premier ne l'est pas pour la seconde. La main du fisc, d'habitude si prompte à fouiller dans la poche des contribuables, accorde ici des crédits d'impôt sans égard à la leur légitimité.

Les sommes en jeu ne sont pas négligeables. Québec rembourse entre 26% et 75% des frais de garde payés, dépendant du revenu familial. Un crédit si généreux que pour bien des familles, il revient moins cher de payer 25$ à 30$ par jour dans un service non subventionné que d'avoir une place à 7$, a démontré notre collègue Stéphanie Grammond.

Cette dépense fiscale nous a coûté 429 millions de dollars l'an dernier. Quelle proportion a été versée pour des services illégaux? Il n'est même pas certain que ce calcul existe. Il serait pourtant essentiel de le faire. Ce soutien a beau être indirect (c'est le parent, et non la garderie, qui empoche le crédit), il n'en est pas moins déterminant. Un service qui ne pourrait plus émettre de reçus aurait bien du mal à garder sa clientèle. En acceptant tous les relevés les yeux fermés, Revenu Québec soutient des délinquants avec des fonds publics.

Le ministère et l'agence travaillent là-dessus, mais il n'y a pas encore de projet de loi sur la table, nous dit-on. Ne laissons pas traîner cette situation malsaine. Émettre un reçu donnant droit à un crédit d'impôt est un privilège. Il n'est pas normal que des garderies en situation illégale puissent en abuser si facilement.

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