À quoi bon avoir un bac si c'est pour travailler comme caissier? C'est la question que beaucoup de gens se posent ces temps-ci, alors que plusieurs diplômés universitaires peinent à trouver un emploi dans leur domaine. Les plus touchés ne sont cependant pas ceux qu'on croit.

Quelque 284 000 diplômés universitaires travaillaient au salaire minimum aux États-Unis l'an dernier, signalait récemment le Wall Street Journal. Une situation loin d'être idéale, surtout pour ceux qui ont des dettes d'étude à rembourser. Mais il y a pire. «Les travailleurs hautement qualifiés repoussent les peu qualifiés encore plus au bas de l'échelle et, jusqu'à un certain point, hors du marché du travail», souligne une étude publiée le mois dernier par le National Bureau of Economic Research américain.

Cette concurrence ajoute aux difficultés des travailleurs peu éduqués, déjà affectés par le déclin du secteur manufacturier et la disparition d'emplois exigeant peu de formation. Un phénomène qui se manifeste aussi au Québec et en Ontario, note l'auteur principal de l'étude. «C'est difficile pour les jeunes qui sortent en ce moment mais à long terme, les diplômés universitaires s'en tirent presque toujours mieux. Ils sont débrouillards, ce sont eux qui ont les promotions», souligne Paul Beaudry, professeur au département d'économique de l'Université de la Colombie-Britannique.

Le sort des bacheliers qui occupent des emplois inférieurs à leurs compétences frappe l'imagination. Pourtant, ce ne sont pas eux qui sont le plus durement frappés, mais les diplômés des écoles de métiers. Un sur deux est surqualifié pour le poste qu'il occupe, contre moins d'un sur trois chez les universitaires, montre une étude du Cirano portant sur la grande région de Montréal.

Certains programmes techniques forment-ils trop de personnel pour les besoins du marché ? Il faudrait le vérifier. Ne gaspillons pas des ressources qui pourraient servir à donner des formations dans d'autres secteurs où, au contraire, on manque de main-d'oeuvre.

Cela dit, il faudrait aussi s'interroger sur les domaines universitaires qui engendrent des taux de surqualification aussi élevés que les métiers, comme l'histoire, les arts visuels ou les sciences sociales. L'importance de ces programmes ne fait pas de doute, mais il faudrait peut-être les rendre plus sélectifs, et y accepter moins d'étudiants.

Les Montréalais nés au Canada mais dont au moins un parent est né à l'étranger sont plus souvent coincés dans des emplois inférieurs à leurs qualifications que ceux dont les deux parents sont né ici, montre aussi l'étude des professeur Boudarbat et Montmarquette. Cette histoire-là a moins chances de faire les manchettes que celle d'un bachelier nommé Tremblay qui en aurait marre de son emploi de caissier. Pourtant, il serait temps qu'on s'y intéresse, car c'est une situation tout aussi dramatique, autant pour les individus concernés que pour la collectivité.

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