Une proportion alarmante de travailleurs n'ont pas de quoi prendre une retraite décente. Ceux qui bénéficient d'un bon régime ne sont pas non plus à l'abri, parce que la majorité de ces régimes sont en crise. Bref, le navire fait eau de toutes parts. Le réparer va imposer des efforts à tout le monde. Et non, ça ne peut pas attendre.

Le rapport publié hier par sur l'avenir du système de retraite québécois est implacable. «Pour nous, c'est générateur d'espoir», plaide le président du comité, Alban D'Amours.

De fait, les solutions proposées laissent entrevoir des lendemains pas mal plus agréables. Un avenir où la planification de la retraite porterait essentiellement sur les années précédant l'âge de 75 ans, puisque tous les travailleurs auraient ensuite droit à une nouvelle rente de longévité. Un avenir où les régimes offrant la meilleure sécurité financière, ceux à prestations déterminées (PD), seraient enfin hors de danger - y compris ceux des municipalités, qui pèsent lourd sur les comptes de taxes.

Pour y arriver, toutefois, il faut accepter de faire autrement. Et ça vaut pour tout le monde - à commencer par Québec, pour qui le plus simple serait de ne rien faire. La première ministre a appelé hier à la mobilisation de tous les partis. C'est une ouverture encourageante, mais il faudra davantage.

Les changements requis bousculent beaucoup de monde. Obliger les entreprises n'offrant pas de régime de retraite, et leurs employés, à cotiser à une rente de longévité? Forcer les travailleurs bénéficiant d'un régime PD à faire toutes sortes de concessions? Faire accepter aux retraités de ces régimes que l'indexation de leurs prestations ne sera plus automatique? Obtenir des réinvestissements des employeurs, aussi bien au privé qu'au municipal et dans les universités? Voilà qui va demander un talent politique considérable, car il n'y a pas grand monde au Québec qui ne soit visé par l'exercice, ne serait-ce qu'à titre de contribuable.

La mobilisation est d'autant plus difficile que le problème est encore mal connu, et que ses pires effets mettront du temps à se faire sentir. Personne ne va descendre dans la rue pour réclamer la mise en oeuvre du rapport D'Amours.

Il faut pourtant faire quelque chose, car les régimes de retraite ne vont pas disparaître du radar. Les charges de ceux de la Ville de Montréal représentent déjà 12% du budget de fonctionnement. Combien de temps les entreprises et les résidants accepteront-ils de ramasser la facture? La question se pose en maints endroits. Si rien n'est fait, on se dirige vers un affrontement majeur entre contribuables et employés municipaux.

Et si trop de Québécois arrivent à la retraite sans revenus suffisants, c'est l'État qui sera appelé à la rescousse. L'État, c'est-à-dire les travailleurs restants. Beau conflit de générations en perspective.

Le rapport D'Amours est dérangeant. Mais ce n'est rien en comparaison avec ce qui nous attend si nous décidons de l'ignorer.

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