Non seulement Ottawa n'a jamais limité la teneur en gras trans des aliments, comme cela le lui avait été recommandé, mais Santé Canada ne fait même plus pression sur l'industrie pour qu'elle en utilise moins.

Les gras trans industriels, faut-il le rappeler, n'ont aucune utilité pour le corps humain. Au contraire, ils augmentant le taux de «mauvais» cholestérol tout en réduisent le bon, ce qui est nuisible pour le coeur. Seuls les fabricants en retirent des avantages, au point de vue de la texture et de la durée de vie, notamment.

Un important groupe d'étude, coprésidé par la Fondation des maladies du coeur, avait donc recommandé d'en limiter la teneur dans les aliments. Le ministre de la Santé avait préféré donner deux ans de grâce à l'industrie, en la prévenant toutefois que si elle ne se conformait pas aux limites prescrites, il les imposerait par règlement.

C'était il y a cinq ans. Au terme de la période d'essai, fin 2009, la situation s'était effectivement améliorée. Environ 75% des aliments analysés respectaient les seuils recommandés. Mais plusieurs produits, dont des margarines, des tartinades à l'ail, des shortenings ainsi que des desserts, produits de boulangerie et de pâtisserie contenaient encore beaucoup trop de gras trans.

Le moment aurait été bien choisi pour réglementer. Les fabricants qui avaient déjà corrigé leurs recettes n'auraient pas été affectés, et les autres auraient enfin revu leurs produits. Mais Ottawa n'a rien fait. Pis, Santé Canada ne surveille même plus la teneur en gras trans dans les aliments.

Quel gâchis! Les Canadiens figurent parmi les plus grands consommateurs de ces mauvais gras au monde. Un règlement imposant les limites recommandées aurait eu des effets bénéfiques importants. On parle d'un avantage net de plusieurs milliards de dollars et de plus de 12 000 crises cardiaques évitées sur 20 ans, indique une analyse coûts-avantages préparée pour Santé Canada.

Un comité consultatif du ministère a recommandé l'an dernier de reprendre la surveillance et la divulgation des teneurs en gras trans industriels. «Ce n'est pas dans les plans», nous dit-on bureau de la ministre Aglukkaq. On se fie plutôt au guide alimentaire et aux tableaux de valeur nutritive «pour permettre aux Canadiens de faire des choix informés».

La Ville de New York, elle, a imposé des limites là où l'information est la moins accessible: dans les restaurants. Résultat? La quantité de gras trans ingurgitée par les clients de la restauration rapide a diminué, montre une recherche publiée la semaine dernière dans Annals of Internal Medicine.

À défaut de réglementer, Ottawa devrait au moins surveiller le secteur agroalimentaire et attirer l'attention sur les entreprises qui abusent de ces mauvais gras. Les meilleures ont été les premières à s'améliorer, mais sans un minimum de pression, les autres n'ont plus d'incitatif à les imiter.

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