L'annonce faite hier par la ministre des Ressources humaines Diane Finley nous éclaire enfin sur les transformations qui se préparent à l'assurance emploi, mais elle laisse encore trop de zones d'ombre et de place à l'interprétation.

Après des semaines de rumeurs alimentées par les déclarations contradictoires, le chat est sorti du sac. On ne se contente pas de réécrire la définition de «l'emploi convenable» - celui qu'un chômeur doit accepter sous peine de perdre ses prestations. On la rend conditionnelle à l'usage que celui-ci aura fait du système au cours des années précédentes. Plus le travailleur aura été «payant» pour le régime (cotisant longtemps et recevant peu de prestations), plus il aura du temps pour chercher un emploi équivalent à celui qu'il occupait. Les chômeurs moins méritants devront faire des compromis sur le salaire et le type d'emploi plus rapidement.

Un travailleur spécialisé, comme un ingénieur, un enseignant ou un opérateur de machinerie, ne sera pas obligé d'accepter un emploi qui ne correspond pas à ses compétences, a indiqué la ministre Finley. N'empêche, malgré ses précisions et celles de ses fonctionnaires, on n'est pas encore en mesure de dire au public à quoi s'attendre exactement. Il faudra voir les règlements et, surtout, l'interprétation qui en sera faite aux guichets de l'assurance emploi.

Cette distinction entre trois classes de chômeurs, et les différences de traitement qu'elle leur impose, représente un changement majeur au programme. Nous avons cependant de gros doutes sur son utilité.

Avons-nous un problème national de chômeurs qui refusent de bons boulots pour pouvoir se la couler douce sur le bras de l'assurance emploi? Si c'était le cas, ces resserrements se justifieraient. Mais dans l'état actuel des choses, c'est inutilement punitif. La prospérité de l'économie si chère à l'administration Harper nécessite que les Canadiens occupent de bons emplois. L'assurance y contribue en leur donnant le temps de se replacer lorsqu'ils se retrouvent au chômage. S'ils n'y sont pas parvenus à la fin de leurs prestations, alors oui, il sera temps d'envisager un recul. D'ici là, on a intérêt à les soutenir, et non à les court-circuiter, dans leur recherche.

Le travail saisonnier? Oui, on peut se demander si l'assurance emploi est la meilleure façon d'aider, non pas seulement des travailleurs, mais des industries et des régions entières, comme c'est le cas actuellement. La ministre, toutefois, ne propose rien pour changer cette dynamique. Les modifications annoncées se bornent à mettre de la pression sur les chômeurs.

Quant à diminuer le recours aux travailleurs immigrants temporaires, un des principaux objectifs de cette réforme, il ne faut pas oublier que le système actuel fait l'affaire de bien des employeurs. Plusieurs ne trouveraient pas leur compte dans la main-d'oeuvre locale.

Bref, à part se montrer plus tatillon envers ceux qu'il est censé aider, on voit mal ce que changera ce nouveau régime.

Qu'en pensez-vous? Exprimez votre opinion