La Ville de Montréal s'est donnée plus de moyens pour amener les propriétaires de logements insalubres à faire les correctifs nécessaires. Malheureusement, ça ne suffit pas encore.

Jeudi encore, un immeuble de Parc-Extension a été évacué et condamné. Aux habituels rats, blattes, champignons et autres moisissures s'est ajoutée la goutte qui a fait déborder le vase: de l'eau coulant sur des fils électriques, risque inadmissible pour les services d'incendie.

Un cas extrême, mais qui est loin d'être exceptionnel. Des quelque 1600 plaintes d'insalubrité déposées à la Régie du logement depuis cinq ans, les deux tiers proviennent de Montréal, alors qu'à peine plus du tiers du parc locatif québécois se trouve dans la métropole.

Les conséquences du délabrement vont bien au-delà de l'esthétique ou du confort. Cohabiter avec des coquerelles, des rongeurs ou des moisissures est dangereux pour la santé. Plus du tiers des logements montréalais abritant des enfants de 6 mois à 12 ans auraient des problèmes de moisissure ou d'humidité excessive, indique une enquête réalisée pour la direction de santé publique. Près de 5% auraient des coquerelles et 6% auraient des rongeurs. Tous ces indésirables expliqueraient plus de 5000 cas d'asthme et près de 4000 cas d'infections respiratoires chez les enfants.

Montréal a de nombreux outils pour serrer la vis aux propriétaires négligents. En plus du travail des arrondissements, qui sont les premiers interpellés par les plaintes d'insalubrité, les inspecteurs de la ville centre sont intervenus dans 600 immeubles depuis cinq ans. Les amendes minimales pour les infractions touchant la santé ou la sécurité ont augmenté. Les proprios qui refusent de faire les correctifs se retrouvent en cour et, même, s'exposent à ce que la Ville fasse faire les travaux et leur refile la facture.

Ce dernier recours a l'avantage de damer le pion aux proprios qui profitent des lenteurs du système. Pourtant, la Ville l'a utilisé seulement quatre fois en cinq ans. Et malheureusement, on en voit déjà les limites. Le proprio du taudis de Parc-Ex s'était fait administrer cette médecine de cheval il y a quelques années. Sans effet, puisque le bloc évacué jeudi est le deuxième de ses immeubles à subir ce sort depuis l'automne.

Le système donne encore beaucoup trop de corde aux proprios malhonnêtes. Ils peuvent maintenir leurs locataires dans des situations intolérables bien longtemps avant d'être forcés d'y remédier. Dans leur logique tordue, ils ont tout avantage à faire traîner les choses: ils repoussent le paiement des rénos tout en continuant d'encaisser les loyers.

Il faut trouver des moyens de couper court aux délais, sinon on n'en sortira jamais. Montréal doit serrer cette vis-là aussi, mais elle aura peut-être besoin d'aide. La location de logements insalubres est un commerce immonde qui ne devrait pas être toléré. S'il faut changer les lois pour pouvoir intervenir rapidement, Québec doit s'en mêler.

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