La participation possible de la Chine au Fonds européen de stabilité financière (FESF) montre à quel point l'équilibre économique mondial est en mutation.

L'affaire n'est pas faite. Le directeur du Fonds, Klaus Regling, affirme qu'il n'y a pas de négociations en cours. Il a cependant rencontré un vice-ministre des finances chinois hier à Pékin. La veille, c'est le président français Nicolas Sarkozy qui s'entretenait avec son homologue Hu Jintao. Et la Chine, qui possède déjà des obligations du FESF, a manifesté son intérêt à soutenir l'euro. Elle dit maintenant attendre les détails techniques du fonds spécial censé démultiplier la puissance d'invention du FESF, de 440 milliards à environ 1000 milliards d'euros. Effectivement, le plan annoncé jeudi, comme toutes les ententes conclues de justesse, est avare de détails.

La Chine, déjà le plus gros créancier des États-Unis, a tout intérêt à diversifier son portefeuille. Elle a aussi intérêt à ce que son plus gros client se maintienne à flots. Sa contribution pourrait osciller entre 50 et 100 milliards d'euro, avance le Financial Times.

Certains, toutefois, s'inquiètent que l'Europe devienne redevable de Pékin. Le client a toujours raison, mais le jour où il demande à son épicier de lui faire crédit, c'est une autre histoire. Peut-on imaginer que la Chine viendrait au secours de la zone euro sans contrepartie, a réagi le candidat socialiste aux présidentielles françaises, François Hollande.

C'est, à tout le moins, la confirmation d'un profond changement dans l'équilibre des forces économiques mondiales. Le Brésil ne semble pas vouloir contribuer directement au fonds, mais les rumeurs sur son rôle éventuel montrent combien la donne a changé. Autant s'y faire, car on en verra de plus en plus les manifestations.

Le Chinois moyen n'a pas le confort de son vis-à-vis européen, mais son gouvernement est riche. Les membres de la zone euro, qui ne peuvent s'endetter davantage, doivent regarder ailleurs pour financer leur fonds de stabilisation. Le Japon et le fonds souverain de la Norvège ont manifesté leur intérêt, mais la Chine, détentrice des plus importantes réserves de change au monde, est devenue un banquier assez incontournable.

La dynamique interne de l'Europe aussi s'en trouve transformée. Il y a ceux qui se font imposer des conditions, comme la Grèce, et ceux qui dictent les leurs, comme l'Allemagne. Ce rapport de forces, dénoncé par plusieurs, ne changera pas tant que les plus endettés n'auront pas nettoyé leur bilan.

Ce nouveau plan rétablira-t-il une confiance durable ? Après l'enthousiasme de jeudi, l'esprit critique a repris le dessus hier. La plupart des parquets européens ont clôturé en baisse devant le manque de précisions, suivis par des indices nord-américains en faible hausse. Et pour la première fois depuis l'adoption de l'euro, l'Italie a dû payer plus de 6 % pour emprunter à 10 ans. Visiblement, le doute subsiste.

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