En faisant cause commune, les médecins, pharmaciens et le ministère de la Santé ont réussi à faire diminuer la consommation d'antibiotiques au Québec. Un exemple qu'on aimerait voir plus souvent dans notre système de santé.

Le déclic s'est produit en 2004, alors que le Québec était aux prises avec une nouvelle souche de C. difficile. Bien que cette bactérie frappe surtout dans les hôpitaux, on a décidé d'agir à l'extérieur des établissements, où 80% des antibiotiques sont prescrits. Une agence gouvernementale, le Conseil du médicament, a produit des lignes directrices sur les infections les plus courantes, des otites aux infections urinaires en passant par les bronchites, sinusites, et autres pneumonies. En janvier 2005, 11 documents brefs (deux pages présentées de façon très visuelle) ont été envoyés à tous les médecins de la province, et offerts en téléchargement sur l'internet.

L'effet a été immédiat. Le nombre d'ordonnances d'antibiotiques par 1000 habitants a diminué de 4,2% en 2005 par rapport à l'année précédente, montre une étude publiée cette semaine dans la revue scientifique Clinical Infectious Diseases. C'est d'autant plus remarquable qu'elles ont augmenté de 6,5% ailleurs au Canada durant cette période. Un effet durable. Deux ans plus tard, le taux d'ordonnances par 1000 habitants était toujours 6% inférieur à l'année précédant l'intervention. Et les données partielles consultées depuis ne montrent pas de tendance à la hausse, selon le principal auteur de l'étude, le Dr Karl Weiss, de l'Université de Montréal. Tout le contraire des autres provinces, où le taux a bondi de 5,5% entre 2004 et 2007.

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La convivialité des lignes directrices y est sûrement pour quelque chose. Sans un effort concerté, elles auraient toutefois pu rester lettre morte. Mais tout le monde a poussé la roue. Les ordres professionnels des médecins et des pharmaciens, les associations médicales et le ministre ont écrit aux médecins. Les facultés de médecine ont été sensibilisées, et les sociétés pharmaceutiques ont été priées de tenir compte de ces directives dans leur marketing et leurs activités de formation.

Même les patients commencent à faire leur part. «Il y a aussi un changement dans la culture des gens. On accepte mieux de ne pas recevoir d'ordonnance quand on consulte un médecin», note Karl Weiss. Évidemment, il y a du travail à faire. Mais les progrès sont encourageants, surtout qu'il se prescrivait déjà moins d'antibiotiques ici. Le coût par 1000 habitants a d'ailleurs chuté de presque 11% au Québec entre 2004 et 2007, alors qu'il s'est maintenu dans le reste du pays.

Cela dit, c'est la résistance aux antibiotiques, bien plus que leur coût, qui devrait nous inquiéter collectivement. Pour conserver l'efficacité de ces médicaments, il faut les prescrire et les consommer correctement. Ce qui implique de privilégier le traitement le plus court possible, et parfois même de s'abstenir - lorsqu'on soupçonne une infection virale, par exemple.

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