Le jugement rendu lundi contre Stéphane Rail et la firme Valeurs mobilières TD est accablant pour le courtier, mais son ex-employeur n'en ressort pas grandi non plus.

Le jugement rendu lundi contre Stéphane Rail et la firme Valeurs mobilières TD est accablant pour le courtier, mais son ex-employeur n'en ressort pas grandi non plus.

Il aura fallu près de 10 ans à l'entrepreneur beauceron Hermann Cloutier pour faire reconnaître qu'il a été victime de son conseiller en placements et non, comme le prétendait Valeurs mobilières TD, de son «appât du gain».

La TD savait pourtant, depuis le printemps 2001, que le courtier avait agi de façon inacceptable. C'est justement pour cette raison qu'elle avait alors mis fin à son lien d'emploi, citant de graves violations à ses directives de conduite et à sa politique de conformité. Elle avait même demandé que le dossier de Stéphane Rail soit classé «ne peut être réengagé» dans ses archives.

Il y a plus étonnant encore. Non seulement la firme a-t-elle permis à son employé fautif de démissionner, lui évitant le stigmate d'un congédiement, mais elle a apparemment beaucoup fait pour protéger sa réputation. Selon le document fourni en preuve, la TD a accepté de ne pas parler des «circonstances» à l'origine de cette démission forcée. Ni dans le dossier de Stéphane Rail, ni à ses aux collègues, ni à des tiers. Pas même à ses clients.

Ces arrangements ne sont pas responsables des pertes subies par M. Cloutier, ils sont survenus après. Le juge Bernard Godbout souligne néanmoins le caractère déplorable de «cette manoeuvre de camouflage» de la part de TD, une institution bancaire.

Et comment! La firme donne l'impression de se soucier davantage de l'employé qu'elle a désavoué que de la protection du public, qu'elle prive d'informations inquiétantes au sujet de ce courtier. C'est proprement choquant.

La TD n'a pas voulu commenter le jugement. Pas plus que Canaccord, l'actuel employeur de Stéphane Rail, aujourd'hui directeur de succursale à Québec.

Le courtier en placement avait déjà été condamné à 155 000$ d'amendes et autres frais par l'Organisme canadien de réglementation du commerce des valeurs mobilières il y a deux ans. L'OCRCVM étudie la décision de la Cour supérieure pour voir s'il y a lieu de prendre d'autres mesures. Heureusement! Un jugement qui condamne un courtier encore en exercice à verser plus de 6,7 millions à un ancien client et mentionne qu'il a appuyé sa défense sur de faux documents peut difficilement être ignoré.  

Mais on aimerait aussi savoir, à la lumière des preuves retenues, ce que l'Organisme pense de la façon dont la TD a géré le départ de son ex-employé.

La firme se serait engagée à ne mentionner rien d'autre qu'une démission dans l'avis de cessation d'emploi qu'elle devait remplir auprès des autorités réglementaires. Avait-elle le droit de taire ses vrais motifs? La question se pose, d'autant que les nouveaux formulaires d'avis de cessation demandent beaucoup de détails, même pour une démission. De toute évidence, les autorités jugent cette information très pertinente pour la protection des investisseurs...

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