« Le Canada a été honteusement silencieux devant la parodie de justice qui a mené à la détention de son citoyen. »

La célèbre avocate Amal Clooney, femme de l'acteur vedette George Clooney, n'a pas mâché ses mots l'an dernier à l'égard du gouvernement canadien de Stephen Harper. Elle lui reprochait de ne pas s'être impliqué assez vigoureusement pour obtenir la libération de son client, le journaliste Mohamed Fahmy.

Accusé d'avoir répandu des fausses nouvelles, ce reporter canado-égyptien a vécu un véritable calvaire. Il a été enfermé pendant 438 jours dans une prison égyptienne pour avoir, en fait, exercé son métier.

Mohamed Fahmy fait campagne ces jours-ci avec Amnistie internationale pour qu'aucun autre citoyen canadien ne connaisse le même sort que lui. Ils veulent éviter que le Canada ne soit à nouveau trop silencieux dans le cas de certains Canadiens « victimes de violations des droits de la personne à l'étranger », alors que dans d'autres cas, Ottawa fait du bruit et se démène.

On constate d'autant plus que cette discrimination existe depuis le retour au Canada - enfin ! - de la Montréalaise Homa Hoodfar. Dans son cas, le gouvernement semble avoir trimé dur pour qu'elle soit libérée. Et c'est tant mieux !

Deux poids, deux mesures : non merci, préconisent Mohamed Fahmy et Amnisitie internationale.

L'idée est bonne et l'initiative est louable. Une « charte de protection » a été conçue et présentée au gouvernement de Justin Trudeau, qui est en train de revoir sa politique consulaire. On y retrouve 12 recommandations.

On souhaite par exemple qu'Ottawa enchâsse dans une loi l'obligation pour le gouvernement d'accorder une aide consulaire à ses citoyens. On y préciserait que « tous les Canadiens » doivent être traités de la même façon.

On suggère aussi la création d'un bureau indépendant pour examiner l'aide offerte aux citoyens canadiens à l'étranger. Celui-ci aurait « l'obligation d'informer les Canadiens des efforts déployés » dans chaque cas.

On aimerait également qu'Ottawa s'engage à aider non seulement ses citoyens, mais aussi des personnes « entretenant des liens étroits avec le Canada » (on pense tout de suite à Raif Badawi, détenu en Arabie saoudite alors que le reste de sa famille habite Sherbrooke).

Dans chaque cas, on cherche visiblement à éviter que surviennent d'autres injustices.

Il est souhaitable d'avoir une discussion à ce sujet, mais il faut éviter de codifier à outrance l'offre d'aide consulaire pour les Canadiens en plein désarroi à l'étranger.

Premièrement parce qu'en vertu du droit international, il n'est pas aisé de légiférer pour promettre que les Canadiens qui ont de multiples nationalités seront traités sur le même pied que ceux qui détiennent uniquement la citoyenneté canadienne.

Comment définir, par ailleurs, le type de « liens étroits » qu'un ressortissant étranger entretient avec le Canada pour que nos élus soient forcés de les aider ?

Enfin, le cas de Homa Hoodfar (comme bien d'autres avant elle) a démontré à quel point il est souvent plus facile d'obtenir la libération de détenus à la suite de négociations derrière des portes closes, tout en faisant publiquement du bruit... mais pas trop. Ce qui permet souvent aux autorités du pays avec lequel on négocie de sauver la face et de ne pas avoir l'air, devant ses citoyens, d'être prises en flagrant délit de faiblesse. Forcer nos diplomates à publier la liste des « efforts déployés » pour chaque détenu canadien à l'étranger pourrait donc être contre-productif.

Ce dossier est donc complexe. Oui, il y a place à amélioration, mais nos élus doivent marcher sur des oeufs. Et ne pas oublier que le mieux est parfois l'ennemi du bien.

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