« Le 11-Septembre nous a légué une planète que nous avons du mal à reconnaître. »

Cette phrase, le célèbre romancier britannique Martin Amis l'a couchée sur papier au début de l'année 2003, soit un an et demi après les attentats concertés contre le World Trade Center et le Pentagone. Leur bilan avait été dévastateur : quelque 3000 morts, un pays au grand complet traumatisé et un monde ébranlé.

L'effet 11-Septembre inquiétait Martin Amis. Les dérives de nos sociétés sur le plan moral, par exemple. Et ce qui l'effrayait par-dessus tout était de voir que le président américain George W. Bush s'apprêtait à envahir l'Irak.

Quinze ans après les attentats terroristes du 11 septembre 2001, ce constat posé au sujet de notre planète demeure, malheureusement, hautement pertinent. Et encore plus consternant.

Comme des dominos qui chutent et qui en entraînent plusieurs autres à leur suite, les tours jumelles se sont effondrées à New York en déclenchant une réaction en chaîne. Elle n'est pas terminée.

L'effet 11-Septembre subsiste, telle une fatalité.

Le premier domino, à l'époque, est tombé presque immédiatement. La guerre en Afghanistan, dans laquelle le Canada a été impliqué (plus de 150 de nos soldats y sont morts), a été déclenchée.

Puis, les faucons qui entouraient George W. Bush à la Maison-Blanche ont réussi à vendre à des Américains déboussolés l'idée d'envahir l'Irak. Pays qui n'avait pourtant rien à voir avec les attentats aux États-Unis. Quelle hérésie...

Aucune de ces guerres n'a été gagnée. Celle en Irak a été un échec particulièrement cuisant pour les Américains. Ce qui ressemblait déjà à un mauvais film au milieu des années 2000 a connu, depuis, des rebondissements qui rendent son scénario encore plus navrant.

Le conflit a amplifié la fracture entre les sunnites et les chiites (les deux grands courants de l'islam). Cette plaie ouverte, jumelée entre autres à la mauvaise gestion de l'après-guerre par les Américains, a favorisé la naissance du groupe armé État islamique. La plupart des responsables de cette organisation terroriste aussi barbare que redoutable s'étaient connus dans des prisons américaines en Irak.

L'islamisme radical n'est pas né avec le 11-Septembre. Loin de là. Il y a plusieurs décennies que les fondamentalistes lavent le cerveau d'un trop grand nombre de musulmans. Mais les attentats sur le sol américain - ce massacre retentissant d'un si grand nombre d'innocents - ont fait école. On l'a vu, entre autres, à Paris, Istanbul, Nice et Beyrouth au cours des deux dernières années.

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Ils n'étaient pas nombreux, en septembre 2001, à dénoncer (à tort) les musulmans dans leur ensemble. Mais l'impact de ces attentats sans précédent aux États-Unis et, au cours des 15 dernières années, la multiplication des actes terroristes perpétrés par des fous d'Allah ont accentué cette tendance. À laquelle il faut résister.

C'est d'autant plus difficile que les terroristes d'aujourd'hui font tout pour semer la discorde au sein de nos sociétés. Et qu'une crise des migrants - historique - nous pousse, trop souvent, à craindre l'autre. À nous méfier de celui qu'on connaît mal ou qu'on ne connaît pas. À rêver de murs et de tests de valeurs. À remettre en question nos élans de générosité et notre altruisme. Notre humanisme, en somme.

Pourtant, s'il y a une leçon qu'on doit tirer des attentats du 11 septembre 2001, c'est qu'on surmonte uniquement ce genre de tragédie en faisant preuve de fraternité, de solidarité et d'ouverture.

Avec comme objectif d'empêcher les prochains dominos de tomber.

Ce n'est pas simple, dans l'adversité, alors que nos ennemis cherchent à nous diviser. Mais c'est ce qui nous permettra de relever plus facilement les défis qui découlent des attentats d'il y a 15 ans et de leurs répercussions. Ainsi que les autres, criants, auxquels l'humanité est confrontée.

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