Le texte de Marc Séguin publié dimanche sur la fonderie Horne⁠1 a suscité des commentaires intéressants de nos lecteurs. Voici un aperçu des courriels reçus.

1. Lisez le texte de Marc Séguin

Désespérant

Désespérant, votre texte parce qu’il frappe dans le mille ! Ça part de soi, dites-vous, mais ceux qui travaillent à la fonderie Horne ne sont pas prêts à perdre leur emploi, leur gagne-pain, devrai-je dire. Éternel dilemme ! Je vis en Abitibi et j’ai joué au tennis à Noranda avec, dans la bouche, le goût de la fumée des cheminées quand le vent soufflait de notre côté ! Les résidants proches de la fonderie sont contre, mais toute la ville ? Même chose qu’avec les effets des changements climatiques, qui se rapprochent irrémédiablement de nous (Îles-de-la-Madeleine, Terre-Neuve, Île-du-Prince-Édouard…), mais les gouvernements ne sont pas en mode urgence ! C’est désolant, désespérant, vous disais-je au début !

Hélène Vincent, Val-d’Or

Le rôle de l’étalement urbain

Entièrement d’accord avec votre texte sauf un petit bout : au même titre que pour les sites d’enfouissement de certaines villes, c’est plutôt la banlieue qui est allée rejoindre l’usine et non l’inverse. N’empêche, ça ne dédouane pas cette multinationale des effets nocifs que provoque son activité sur les habitants qui l’entourent, mais ça devrait servir à convaincre que l’étalement urbain a, lui aussi, une part de responsabilité dans les problèmes que plusieurs villes pourraient rencontrer dans les années futures.

Simon Bourgault

Une question de valeurs

Vous avez raison sur un point : nous sommes tous des contributeurs de l’exploitation des mines et des usines de recyclage. Par contre, on peut très bien exploiter des mines sans exploiter l’être humain (sauf Glencore) et on peut très bien exploiter une usine de recyclage sans polluer les quartiers environnants. C’est une question de valeurs et de volonté.

Gilbert Savard, Québec

La part des choses

Difficile de faire la part des choses. Bien sûr, mettre dans l’atmosphère des produits toxiques et nocifs est loin d’être souhaitable. Cependant, sommes-nous capables de bien chiffrer le danger, l’inconvénient, le risque de respirer cet air. À ce jour, la Santé publique pense que le risque d’inconvénient s’avère minime, et lorsque l’on consulte les données statistiques sur la prévalence du cancer du poumon en Abitibi, curieusement, cette région ne figure pas si mal ; d’autres régions au Québec déclarent davantage de cancers du poumon. L’analyse de cette question n’est pas simple ; peut-être que rendre la région des mines plus riche par de bons salaires réduit d’autres inconvénients de santé liés à la pauvreté ? Qui sait… peut-être que les bleuets consommés, cueillis de main autochtone possèdent des vertus inédites surtout s’ils sont arrosés par du sirop d’érable riche en québécois. Beau texte, lu avec intérêt.

Hugues Beauregard

Des bleuets à prix d’or

Quand je veux manger des bleuets, je ne les cueille pas dans ma région, Rouyn-Noranda, car la contamination y est trop importante. Je les achète moi aussi à Louvicourt (à 135 km de la fonderie) en espérant que la pollution de la Horne ne va pas jusque-là. Sinon, comme cette année, à l’épicerie à prix d’or (en Abitibi, on est habitués à parler de l’or) en espérant que le mot biologique écrit sur le sac veuille encore dire quelque chose.

Quant à la situation qui prévaut à Rouyn-Noranda, elle est loin d’être réglée. Le ministre Benoit Charette va renouveler, en novembre, le permis ministériel octroyé à la fonderie pour cinq ans sans obligation de réduire ses émissions avant 2027.

Eh oui, la fonderie aura le loisir de déverser dans l’air jusqu’à 100 ng/m⁠3 d’arsenic sans obligation de sa part de réduire, durant cette période, ses émissions, contrairement aux recommandations formulées il y a un mois par le directeur de santé publique, le DLuc Boileau, de réduire un peu plus chaque année, durant ces cinq années, ces émissions pour atteindre 15 ng/m⁠3 en 2027 (cinq fois la norme réglementaire provinciale).

Je ne vous parle même pas des métaux lourds qui ne font, pour l’instant, l’objet d’aucune directive gouvernementale. Là, c’est le free for all.

Enfin, parlons du Festival de musique émergente (FME). Les organisateurs érigent la scène extérieure dans le quartier le plus pollué de la ville, au pied des cheminées, dans ce même quartier où les enfants (et les adultes, dont ma tante et une amie) sont contaminés, selon l’étude de biosurveillance (2018-2019) quatre fois plus que ceux du groupe témoin (Amos). Le FME, dans sa publicité sur son site internet, est fier de s’associer à la fonderie Horne, l’un de ses commanditaires.

On n’a plus les artistes qu’on avait. Il fut un temps (au temps de ma jeunesse, j’ai maintenant 67 ans) où les artistes auraient dénoncé haut et fort cette entreprise. De nos jours, ils chantent leurs chansons dans la ville la plus contaminée de l’Amérique du Nord comme si de rien n’était. J’ai écrit à deux reprises à la direction du FME afin de la sensibiliser à cette question, au printemps dernier, mais je n’ai même pas reçu un accusé de réception.

Louis Cossette