Avec les réseaux sociaux, il est plus facile que jamais d’organiser une sortie en plein air. On lance une invitation sur un groupe Facebook de randonnée, on fixe un lieu et une heure de rendez-vous, et hop !, un petit groupe se forme. Mais voilà, même si le processus est informel, l’instigateur de cette randonnée peut endosser une certaine responsabilité en cas d’accident.

« À partir du moment où on se met en position d’organisateur et qu’on est l’instigateur d’une activité organisée, même si c’est de manière très organique sur Facebook et qu’on n’a pas de rétribution ou de contrat, on a la même responsabilité qu’un encadrant », affirme Gregory Flayol, directeur des programmes chez Rando Québec.

Il n’y a pas vraiment moyen de se soustraire à cette responsabilité, comme on pourrait le faire dans d’autres provinces du Canada ou dans des États américains.

« Le petit papier qu’on nous fait signer pour dire ‟OK, je décharge l’organisateur de toute responsabilité”, ça ne fonctionne pas au Québec, indique M. Flayol. Mais on peut avoir un document d’acceptation des risques. »

Il précise qu’il n’est pas avocat et qu’il y a évidemment des zones grises, notamment lorsqu’il est question d’un groupe d’amis qui partent ensemble.

« Les gens ont une responsabilité individuelle, rappelle-t-il. Mais est-ce que cette sortie a été proposée clés en main ? Même s’il n’y a pas échange d’argent, est-ce qu’on a l’impression d’être pris en charge ? »

Devenir un randonneur aguerri

PHOTO MARTIN TREMBLAY, ARCHIVES LA PRESSE

Il faut être encore plus prudent lorsque l’hiver se pointe ou lorsqu’on va en région éloignée, comme dans les monts Groulx.

Il ne s’agit surtout pas de cesser d’organiser des sorties.

« Les gens qui font des activités sur Facebook, ces groupes organiques, c’est génial, ça aide les communautés à aller dehors, on doit continuer à faire ça, souligne M. Flayol. Mais on ne peut pas essayer de se dérober à notre responsabilité. J’aurais plutôt tendance à dire aux gens : assurez-vous d’avoir fait ce qu’il faut avant de partir, développez de bons réflexes de randonneur aguerri. »

Rando Québec a préparé un Guide de la pratique et de l’encadrement sécuritaire en randonnée pédestre qui énumère les précautions à prendre et offre divers outils pour mieux analyser les risques.

En vertu du Code civil, les encadrants ont une obligation de moyens et non pas de résultats. On ne peut pas exiger d’eux qu’il n’y ait pas d’accident, mais ils doivent « prendre tous les moyens raisonnables pour qu’il n’y ait pas d’accident », fait savoir le guide.

L’organisateur peut donc vérifier si tous les participants sont en mesure de réaliser la randonnée proposée. Une expérience estivale sur le mont Saint-Hilaire n’est peut-être pas suffisante pour gravir le mont Washington en hiver.

L’organisateur doit vérifier la météo, étudier l’itinéraire, utiliser des moyens fiables de navigation, préparer un plan d’urgence, avoir un moyen de communication, sensibiliser les participants aux risques, vérifier leur équipement.

Rando Québec recommande une formation de premiers soins en région éloignée. Elle offre également des formations d’encadrant de randonnée.

« On n’est pas obligé d’avoir un diplôme, mais on doit démontrer qu’on a fait ce qu’il y avait à faire, qu’on a anticipé, qu’on a pensé à toutes ces choses-là », affirme Gregory Flayol.

PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, ARCHIVES LA PRESSE

Il n’est pas nécessaire d’avoir un brevet pour organiser une sortie en plein air, mais il faut s’informer sur les bonnes pratiques.

Cette question préoccupe Jean-François Lebeau, un randonneur qui organise parfois des randonnées informelles sur les réseaux sociaux.

« C’est quelque chose, donner la responsabilité à quelqu’un, lance-t-il. Le moindrement qu’on veut afficher une sortie publiquement, il faut se protéger, faire ses devoirs. »

Il a consulté le guide de Rando Québec, il comprend l’approche. Mais selon lui, la mise en œuvre demeure problématique.

Considérer le niveau des gens, ce n’est pas si facile que ça. Tu te rends compte sur place que quelqu’un n’est pas apte à affronter la météo. Que fais-tu ? Annuler la sortie ? Dire à la personne de retourner dans son char ?

Jean-François Lebeau, randonneur

« Gérer des gens, ce n’est pas si facile à faire », souligne Jean-François Lebeau.

À ses yeux, ce n’est pas encore tout à fait clair à quel moment un instigateur devient encadrant, notamment lorsqu’on parle d’une sortie avec un groupe d’amis.

Grégory Flayol estime que ça ne devrait pas faire de différence sur le terrain. « En fait, si ce sont de vrais amis, et non pas de simples amis Facebook, tu devrais encore plus prendre soin d’eux », lance-t-il.

Il reconnaît que cette question peut être polarisante.

« Il y a des gens qui vont dire qu’on ne peut plus rien faire, dit M. Flayol. Mais on fait mieux de regarder la réalité plutôt que faire l’autruche. On parle simplement de s’informer pour faire les bonnes choses et pour s’assurer que tout le monde rentre à la maison en un seul morceau et avec le sourire. »

Consultez le Guide de la pratique et de l’encadrement sécuritaire en randonnée pédestre

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