Je prends connaissance, dans La Presse de ce samedi 4 avril 2009, des confidences de Francis Proulx à un faux détenu. Cet homme, accusé du meurtre prémédité de Nancy Michaud, il y a à peine 12 mois, et qui ne regrette rien de ses gestes. Il en rajoute même en exprimant sa haine contre les «riches», contre le patron de la défunte qu'il aurait volontiers tué, contre sa petite communauté de Rivière-Ouelle qu'il aurait elle aussi fait exploser s'il en avait eu les moyens.

Je m'insurge contre ce genre de publicité que les médias font à ce meurtrier avoué et désaxé. Traînant un passé de frustrations, il n'aspirait qu'à devenir «connu», quitte à commettre une bassesse pour y arriver. Il va même jusqu'à évoquer un changement d'établissement carcéral pour y déguster des fruits de mer et des steaks... Une formation et un travail bien rémunéré auraient pu, avec des efforts et de la persévérance, conduire l'accusé au même résultat sans gâcher la vie d'un conjoint et de jeunes enfants.

 

Car c'est bien de cela qu'il est question au cours de ce procès. Sans être passée par là, je sympathise de tout coeur avec le conjoint de Mme Michaud. Son deuil n'est même pas fait qu'il doit subir les affronts de ces aveux et des mauvais traitements que M. Proulx a infligés à sa victime. Nous savons tous que la vie du meurtrier est désormais gâchée. Mais qu'en est-il de celles de la famille de la victime? Un meurtre d'une telle violence, couplé d'un triple viol, un procès qui risque de traîner en longueur, n'ajoutent-ils pas à une douleur déjà insupportable? Je ne sais pas si, en telle situation, je souhaiterais assister au procès et à sa litanie d'horreurs...

Je pense seulement qu'en faisant état du passé plus ou moins misérable de l'accusé, des vulgarités qu'il déferle sans gêne à propos de sa victime, la presse écrite joue son jeu et consent à le rendre tristement «célèbre».

Ne s'est-il pas lui-même targué, alors que les médias se pointaient chez lui pour couvrir le meurtre: «Tu as le privilège de me voir en personne.» Quel triste constat! Notre société est bien malade pour mousser ainsi le «vedettariat» d'un infâme meurtrier.

Je sais, il n'est qu'accusé, mais de son aveu même, il est coupable de ce qu'on lui reproche. Ne pourrait-on pas, dans semblable situation, instituer des règles qui limitent les articles et les entrevues faisant état de ce malencontreux incident et ainsi décourager les autres déséquilibrés qui auraient le funeste goût de marcher dans ses pas pour un peu de notoriété?

C'est dans ces cas que je m'interroge sérieusement sur la pertinence du droit à l'information. A-t-on vraiment besoin de connaître les détails croustillants de l'exécution sordide d'une mère de famille et d'une conjointe qui n'aspirait qu'à un travail utile et à un bonheur tranquille?

 

 

L'auteure réside à Longueuil.