Je suis père de deux adolescents que j'aime inconditionnellement. Une fille de 16 ans et un garçon de 13 ans. Comme tous les adolescents, leurs besoins de déplacements les rendent très dépendants de leur entourage. Dans la mesure où je suis disponible, je leur donne tous les lifts dont ils ont besoin, et ce, avec le sourire. Quand « taxi-pops » n'est pas là, ils peuvent se rabattre sur les transports en commun qui les amènent là où ils le souhaitent.

On a abordé ensemble le sujet des scooters, mobylettes, mopettes et autres zézettes qui pourraient leur donner davantage d'autonomie. Je leur ai expliqué ce que j'en pensais, et disons que mon manque d'enthousiasme face à ces engins d'éraflures massives les a pour le moins déçus. Tous leurs amis en ont pourtant un !

Le permis de la classe 6D délivré par la SAAQ permet à une personne âgée minimalement de 14 ans de conduire un cyclomoteur dont la vitesse maximale est de 70 km/h. Pour obtenir ce permis, la SAAQ exige de suivre un cours théorique et pratique de 6 heures puis de réussir un examen théorique et un test visuel.

Des jeunes très sommairement formés au Code de sécurité routière et totalement inexpérimentés peuvent alors circuler sur la voie publique sans autre formalité.

La plupart du temps, ils sont vêtus d'un t-shirt bedaine, d'un short dont le peu de tissu peine à préserver leur vertu et d'une paire de gougounes qui tiennent miraculeusement à leurs pieds. Ils accueillent généralement un passager à l'arrière tout aussi sommairement vêtu et poussent parfois même la témérité jusqu'à transporter un skateboard surmonté de leur sac d'école, le tout tenant on ne sait trop comment en équilibre, de travers à leurs pieds.

Ils zigzaguent entre les files de voitures, changent de voie sans signaler leur intention, roulent sur la voie centrale d'évitement pour aller plus vite ou freinent à la dernière seconde parce que leur attention est soudainement accaparée par une créature du sexe opposé. Mais peut-on leur reprocher ces comportements absurdes et dangereux quand on ne leur a pratiquement rien appris ?

DANGEREUSEMENT FACILE

J'avoue ne pas comprendre qu'il soit si facile d'obtenir un permis pour ce type de véhicule alors que les conditions qu'un jeune de 16 ans doit maintenant remplir pour conduire une automobile sont de plus en plus restrictives et contraignantes. Se pourrait-il que certains parents considèrent les scooters comme d'inoffensifs jouets bien commodes lorsqu'ils n'ont pas le temps ou l'envie de reconduire leurs ados ici et là ? Est-on à ce point complaisant qu'on ne se soucie pas davantage de la sécurité de nos enfants ?

Je suis moi-même détenteur d'un permis de classe 6A qui me permet de conduire une moto, quelle que soit la cylindrée. Pour y avoir droit, j'ai dû réussir plusieurs examens théoriques et pratiques, me prêter à un total de 26 heures de cours pratiques en circuit fermé et sur la route pour ensuite passer, à la SAAQ, un ultime examen sur route concluant une formation s'échelonnant sur plus de 16 mois.

Pour affiner mes réflexes, j'ai fait de nombreuses sorties accompagné d'un ami motocycliste pour qu'il corrige mes erreurs et me guide dans mes apprentissages. Si toutes ces étapes sont nécessaires pour que la société soit rassurée quant à ma capacité de conduire une moto de manière sécuritaire et responsable, je m'explique mal qu'on accorde ce privilège à un ado de 14 ans, sans aucune expérience préalable de conduite et qu'on ne soit pas le moindrement préoccupé par les risques associés à un tel privilège. On leur permet quand même de conduire à une vitesse de 70 km/h sur une voie empruntée par tous les autres types de véhicules !

Je suis père de deux adolescents que j'aime inconditionnellement et pour cette raison, il est inconcevable pour moi de leur permettre de risquer bêtement leur vie en accédant à leurs souhaits, même au risque d'être le père le moins cool de l'univers. Parce que veiller à leur sécurité et leur bien-être est au coeur de mon rôle de parent. Même s'il faut parfois que je leur dise que le législateur se trompe. Et que papa a peut-être raison.