Au fil des décennies qui suivent l'avènement de la Confédération, le Canada traverse des crises politiques et voit des tensions entre les régions du pays s'exacerber. Un sans précédent est franchi en 1917 devant l'enjeu de la conscription. Peu avant de s'achever en Europe, la Première Guerre mondiale marque une rupture, pour longtemps indélébile, entre les deux grands peuples du pays.

À croire les propos tenus par Mme Rona Ambrose à la rentrée parlementaire, il est facile de penser que l'unité du pays est de nouveau menacée. Le sens de son intervention a manifestement fait écho au vent de contestation qui a frappé les élus des provinces de l'Ouest, après le refus présenté la semaine dernière par la Communauté métropolitaine de Montréal (CMM) devant le projet d'oléoduc Énergie Est de TransCanada. À ce sujet, la réaction du premier ministre de la Saskatchewan est sans doute la plus cinglante et la plus inappropriée.

Une menace à l'unité canadienne, la décision de la CMM ? C'est moins cette décision, entièrement légitime et appropriée dans les circonstances, qui est une menace à l'unité du pays que la réaction intempestive des tenants du projet Énergie Est. Qui plus est, en jetant le blâme sur le Québec, ceux-ci semblent oublier que l'Ontario et la Colombie-Britannique sont loin d'être acquises à la cause des oléoducs.

La chute des prix des matières premières, plus particulièrement la baisse des cours du pétrole, génère indéniablement des difficultés économiques envers lesquelles les provinces de l'Ouest semblent assujetties. Évidemment, il est difficile de ne pas être interpellé par cette réalité et de n'éprouver aucune compassion envers ceux et celles qui sont victimes des ralentissements de l'économie.

Réagir en faisant preuve d'excès et en brandissant la carte de la péréquation est néanmoins inadéquat, d'autant plus que cette avenue est fallacieuse.

Ce genre de commentaire ne peut que contribuer à nouer l'impasse actuelle. Un débat aussi important que celui lié au projet Énergie Est doit se faire à l'abri de la partisanerie.

Pourtant, avez-vous entendu des politiciens de l'Ouest critiquer TransCanada dans la gestion du dossier Énergie Est ? Le refus de l'entreprise à prendre part aux consultations publiques de la CMM et sa méconnaissance des différents cours d'eau traversés par l'oléoduc peut être perçu comme de l'insolence.

Il n'est pas illégitime de se montrer, par exemple, favorable à la construction d'oléoduc. Cette option présente des avantages certains. Cependant, elle comporte aussi une liste de risques et d'inconvénients, en plus de soulever des craintes compréhensives. Les promoteurs d'un dossier comme le projet Énergie Est ont ainsi la responsabilité de faire preuve de délicatesse, d'écoute et de rigueur. TransCanada a choisi de procéder autrement. Elle en paie simplement le prix.

La situation de l'économie dans l'Ouest rappelle que miser, au courant de la dernière décennie, sur le développement de l'industrie pétrolière était imprudent. En espérant que le Canada se montrera à la hauteur des engagements avancés à Paris et que notre pays sera apte à promouvoir une économie qui fait appel à ce que nous avons « entre les oreilles ».