Le gouvernement de Justin Trudeau se trouve confronté à un ensemble de choix qui sera déterminant pour l'économie canadienne au cours des prochaines années. Alors que le prix du pétrole est en chute libre, que le dollar canadien perd de sa valeur et que les déficits s'annoncent plus grands que prévu, le gouvernement doit résister à la tentation de limiter son endettement pour les années à venir comme le prônent le parti conservateur et le nouveau parti démocratique.

L'économie canadienne est à la croisée des chemins. Un investissement massif dans cette économie est nécessaire et cela seulement pourra permettre de remettre le pays sur la voie de la croissance.

Le piège du déficit zéro est grand, mais le Parti libéral l'a déjà mis de côté pendant la campagne électorale et c'est tant mieux. Alors que le Canada retournera encore une fois en récession - ou en période de croissance presque nulle - il est temps de réorienter la production canadienne vers des domaines autres que celui des ressources naturelles.

Le Canada, sous le règne des conservateurs, a succombé à ce que plusieurs appellent la malédiction du pétrole. La présence de celui-ci en grande quantité permet à des gouvernements d'investir très peu dans la recherche et le développement, de taxer faiblement les grandes fortunes et les banques, tout en ayant suffisamment de revenus pour pallier les dépenses courantes.

Ce grand afflux d'argent facile est un piège pour de multiples raisons, comme l'aspect non renouvelable de la ressource ou la grande fluctuation et l'imprévisibilité des revenus qui pourront en être tirés. Le développement d'une ressource naturelle si universelle tend à rendre paresseux le développement économique.

La baisse de régime actuelle de l'économie du pays, tout comme les engagements que le Canada a pris à Paris, appelle à une réorientation majeure de la production canadienne.

Seul un investissement massif et stratégique du gouvernement fédéral peut faire une différence, et ce pour trois raisons principales. 

D'un, les provinces n'ont tout simplement pas les revenus nécessaires pour faire les investissements nécessaires à ces changements. Elles sont prises avec des déficits et une croissance de leurs dépenses dans le filet social (principalement en santé) causé notamment par le vieillissement de la population. 

De deux, une restructuration majeure de l'économie canadienne nécessiterait une coordination importante afin d'en maximiser les effets. 

De trois, les autres solutions pour faire croître l'économie canadienne sont inapplicables ou elles sont une mauvaise idée. Les baisses d'impôts pour les entreprises décrétées par le gouvernement précédent n'ont pas mené à un réinvestissement massif dans l'économie, mais plutôt à une augmentation des dividendes ou bien à un stockage massif de ces liquidités - dans des paradis fiscaux pour plusieurs. Quant à elle, la poursuite du déficit zéro a démontré ses limites en Europe depuis le début de la crise de 2008. Elle est toujours aux prises avec d'importants problèmes de croissance et de chômage, tandis que seuls les États-Unis se sont massivement endettés depuis la crise de 2008 pour enfin avoir un chômage autour de 5 % et une croissance appréciable du PIB.

Il est primordial que le gouvernement Trudeau investisse massivement dans l'économie canadienne, et non pas seulement dans les infrastructures « solides » comme les routes ou les canalisations. Un plan d'action stratégique doit être mis sur pied et les fonds nécessaires à sa réalisation doivent être disponibles. Un soutien majeur à une économie autre que basée sur l'extraction doit être mis en place.

Ces changements seront bons pour les travailleurs, pour l'environnement et pour ces nouvelles entreprises qui seront créées.