Les conservateurs dominent actuellement la scène politique fédérale en Saskatchewan. Pourtant, cette province d'un peu plus d'un million d'habitants est associée depuis longtemps au NPD et à son ancêtre, la Fédération du Commonwealth coopératif.

Au plan provincial, ce parti fut élu pour la première fois en 1944, sous l'égide de Tommy Douglas, qui resta d'ailleurs au pouvoir sans interruption jusqu'en 1961. Bien que les libéraux furent au pouvoir de 1964 à 1971, et les progressistes conservateurs de 1982 à 1991, jusqu'à la victoire de Brad Wall et du Parti de la Saskatchewan en 2007, le NPD était considéré comme le parti de référence de la vie politique provinciale.

Sur le plan fédéral, le déclin du NPD est également clair. Ainsi, lors de l'élection fédérale de 2011, le NPD ne décrocha aucun siège dans la province. À cette élection, les conservateurs remportèrent d'ailleurs 13 des 14 sièges, le libéral Ralph Goodale s'étant facilement fait réélire dans la circonscription de Wascana. Cette dernière victoire était uniquement due à la popularité personnelle de Goodale, les libéraux se classant en troisième place dans les 13 autres circonscriptions, derrière les conservateurs et le NPD.

Le fait que le NPD ait terminé en deuxième place dans toutes ces circonscriptions montre que, même si ce parti ne remporta aucun siège en 2011, il représentait la principale alternative politique au gouvernement Harper. Cette remarque est toujours valide en 2015, car bien que toujours derrière les conservateurs dans les sondages, le NPD devance confortablement les libéraux.

Un autre facteur favorable au NPD est le nouveau découpage des circonscriptions électorales adopté il y a deux ans, au grand dam des conservateurs.

L'ancienne carte électorale favorisait les conservateurs, car même les circonscriptions situées dans les deux plus grandes villes, Regina et Saskatoon, comprenaient d'importantes zones rurales, dans lesquelles le parti de Stephen Harper domine complètement. Pour l'élection de 2015, au contraire, Regina et Saskatoon possèdent désormais chacune des circonscriptions purement urbaines, une situation favorisant le NPD, qui jouit d'un avantage clair dans les villes centres. La nouvelle carte électorale à elle seule devrait aider le NPD, qui a des chances réelles de faire des gains aussi bien à Regina et qu'à Saskatoon.

Dans les circonscriptions rurales et semi-rurales, les conservateurs ont clairement l'avantage, comme c'était le cas en 2011, où ils remportèrent plusieurs sièges avec des majorités écrasantes. Une exception majeure à cette règle est la circonscription de Desnethé-Missinippi-Churchill River, située au nord de la province. Immense sur le plan géographique, cette circonscription abrite une population à plus de 70 % autochtone. D'ailleurs, cette année, les candidats des trois principaux partis sont autochtones : le député sortant Rob Clarke (Parti conservateur), Lawrence Joseph (Parti libéral) et Georgina Jolibois (NPD). Clarke l'avait emporté de justesse en 2011 et l'impopularité de son parti auprès de la population autochtone pourrait favoriser ses opposants, dans une province où, comme au Manitoba, les autochtones représentent plus de 15 % de la population.

Sentant peut-être que la nouvelle carte électorale pourrait menacer la domination de ses alliés fédéraux, les conservateurs, le premier ministre Brad Wall soutient Stephen Harper dans des dossiers comme ceux de l'énergie, de l'environnement et du Sénat (un rare point de discorde concerne la péréquation, une question controversée que M. Wall, contrairement à M. Harper, tente d'inscrire à l'agenda de la présente campagne). Reste à savoir si les alliés conservateurs de M. Wall seront en mesure de limiter les gains potentiels du NPD à Regina et à Saskatoon, où ce parti pourrait ouvrir une brèche dans l'actuelle suprématie conservatrice.