On apprenait récemment la création d'un comité ayant comme mandat d'étudier l'enjeu de l'aide médicale à mourir et d'établir des recommandations sur l'encadrement légal de cette pratique au Canada.

Rappelons que, le 2 février dernier, la Cour suprême a déterminé, dans son jugement dans l'affaire Carter c. Canada, l'inconstitutionnalité des lois actuelles par rapport à la Charte canadienne des droits et libertés. Le gouvernement disposait alors d'un an pour ajuster le Code criminel au jugement de la Cour.

Le pays se lance donc dans un exercice important qui soulèvera de grandes questions sur la vie, la mort et le rôle qu'y joue l'État. Pour tous les Canadiens, il est primordial que ce travail se fasse de façon ouverte et objective. On peut cependant croire que le débat sera difficile, peut-être même entaché sur plusieurs points.

UN COMITÉ IMPARTIAL ?

Avec l'annonce de la création du comité, on apprenait également que Catherine Frazee et Harvey Max Chochinov seraient deux des trois membres appelés. Tous deux ayant témoigné contre l'aide médicale à mourir dans l'affaire Carter, l'impartialité du comité est gravement remise en question. Aussi qualifiés soient-ils, ces universitaires ont publiquement pris position, allant même jusqu'à témoigner pour un côté de la balance juridique. On leur demande maintenant de répondre au jugement qui les a battus. Alors que le pays compte plusieurs autres constitutionnalistes et experts en soins palliatifs ou en éthique, le choix est douteux.

La composition même du comité laisse à désirer. Avec trois membres, la balance d'opinion, si balance il y a à avoir, est totalement biaisée, alors qu'un nombre pair assurerait une meilleure représentation. Le nombre minime de membres est également ridicule pour l'enjeu. D'autres comités se penchant sur des questions beaucoup moins cruciales ont compté jusqu'à six membres. Espérons que les consultations publiques sauront inclure des experts de différentes sphères et refléter l'ensemble des perspectives.

Le temps alloué au gouvernement est, selon moi, l'aspect le plus révoltant de l'affaire. En un an, dont un été complet (période durant laquelle les parlementaires ne siègent pas) et au moins 37 jours de campagne électorale, en plus d'une transition gouvernementale à Ottawa, il est illusoire de croire qu'un travail complet et exhaustif pourra être accompli. Le ministre de la Justice, Peter MacKay, a laissé savoir que le prochain Procureur général pourra demander une prolongation à la Cour. L'accorder ne serait que bon sens.

DES ÉCHANGES SAINS

Les échanges publics devront également demeurer sains. Il est très facile de citer des cas précis pour démonter tout le débat, tomber dans la pente fatale et perdre de vue l'intérêt de tous. L'aide médicale à mourir ne doit pas nécessairement être du tout ou rien. On se doit de laisser la porte ouverte à des règles précises. Quelques personnes perdront-elles la vie à cause de ces nouvelles lois ? Peut-être. Certains se verront-ils exclus par celles-ci ? Probablement.

Le cadre juridique devra être ajusté et s'adapter aux expériences futures, comme l'ensemble des législations. De telles erreurs seraient terribles, bien entendu. D'où l'importance d'une étude initiale exemplaire. La peur de l'erreur ne devrait par contre pas priver l'ensemble des Canadiens de leurs droits, tel que déterminé par la Cour suprême.

Il s'agit ici d'un enjeu délicat et d'une belle occasion pour notre pays d'avoir une discussion franche et éclairée.

C'est dans des points comme ceux soulevés qu'on arrive à purifier un débat et à tirer une conclusion pour le mieux. S'il y a une chose sur laquelle chaque camp semble s'entendre, c'est que la vie et la mort méritent un débat parfait, sans écarts ou partisanerie. Travaillons pour s'en approcher.