Le Guide alimentaire de santé Canada est une ressource indispensable pour les institutions publiques qui desservent une clientèle particulière, comme les hôpitaux, les écoles et les centres pour personnes âgées.

Par contre, pour les consommateurs, c'est une autre histoire. Plusieurs se souviennent des cours d'économie familiale durant lesquels le Guide alimentaire canadien était mis en vedette et dont le contenu était matière à examen en fin d'année. Depuis, les vertus de ce Guide ont constamment été critiquées par plusieurs, incluant des chercheurs en nutrition. Ceux qui pourfendent le Guide et le processus qui mène à sa rédaction estiment qu'il faut maintenant passer à autre chose et adopter une approche plus contemporaine.

Au Canada, le premier guide alimentaire a vu le jour en 1942. Après avoir vécu la Grande Dépression et la guerre, le gouvernement croyait bon d'offrir aux Canadiens un parchemin normatif pour éliminer la malnutrition. À ce moment, plus de 60 % des Canadiens souffraient d'une alimentation mal équilibrée. De nos jours, la situation est fort différente et le Guide canadien émane plus que jamais d'une démarche très politisée sans nécessairement oublier ses origines.

D'abord, quelques commentaires sur le processus de rédaction incroyablement long pour ce genre de document. Le Guide que nous consultons actuellement est en vigueur depuis 2007. Santé Canada a pris 15 ans pour pondre cette nouvelle version qui démontre en somme des changements très élémentaires. Aux États-Unis, le guide alimentaire est revu tous les cinq ans. Nous avons beau dire que les Américains mangent mal, mais au moins, leur guide est actualisé beaucoup plus fréquemment que le nôtre. Avec les courants alimentaires en constante évolution et les influences qui proviennent d'un peu partout dans le monde, un ajustement plus fréquent est de mise.

BEAUCOUP D'ACTEURS IMPLIQUÉS

Puisque le processus est interminable, plusieurs y collaborent. Santé Canada insiste pour que l'équipe de rédaction ne soit formée que de chercheurs inspirés par des connaissances scientifiques actuelles. Sans doute, sauf qu'il demeure difficile de croire que certains groupes d'intérêts n'y participent pas du tout ! En regardant les groupes alimentaires suggérés dans le présent Guide, les piliers du monde agricole canadien y sont très bien représentés. Le lait, les viandes, les céréales : tout y est. Certes, ce principe ne date pas d'hier, puisqu'en 1942 l'un des objectifs du Guide était de promouvoir les denrées agricoles canadiennes. Même avec une approche plus subtile aujourd'hui, l'objectif semble encore être le même.

Il ne tient pas compte non plus du vieillissement de la population et du fait que presque la moitié de nos repas sont consommés à l'extérieur de la maison. En vue d'améliorer la santé des consommateurs canadiens, un guide alimentaire doit désormais cibler ses efforts sur de bonnes habitudes alimentaires, telles que la cuisine et d'autres éléments en périphérie qui sont tout aussi importants.

Pendant que d'autres pays progressent, le Canada semble se contenter d'une approche caduque. En Europe, par exemple, le guide met l'accent sur l'acquisition de compétences en alimentation liées à la santé, la salubrité, la préparation et la manipulation des aliments. Ces guides démontrent même une flexibilité séduisante qui laisse de la place pour les produits frais provenant de sources locales. On discute aussi de choix à effectuer au restaurant. Au Brésil, on suggère même de manger à des heures régulières et dans des endroits appropriés, avec des personnes qui nous sont chères. C'est une approche holistique qui détonne du style insipide du Guide alimentaire canadien.

Bien sûr, la responsabilité de mieux manger nous appartient à tous. Chacun de nous prend des décisions alimentaires de façon quotidienne qui affecteront potentiellement notre santé à long terme. Plusieurs n'ont vraiment pas besoin d'un gouvernement pour leur dicter quoi manger et quoi éviter d'ingurgiter. Cela va de soi. Malgré tout, certains préconisent une approche différente. Pour cela, nos législateurs doivent montrer l'exemple en adoptant un guide alimentaire digne du XXIe siècle.