M. Legault,

C'est avec une grande consternation que j'ai entendu votre proposition sur l'immigration.

Après l'épisode de la charte, je ne croyais pas votre parti voudrait, à son tour, se faire du capital politique sur le dos des immigrants.

Pour que vous compreniez pourquoi votre proposition me blesse personnellement, laissez-moi vous raconter brièvement mon histoire (bien qu'ordinaire pour un immigrant).

Ma famille et moi sommes arrivés au Canada en 1979. J'avais 10 ans (le plus jeune), mon père 49 et ma mère 46. Nous sommes arrivés avec 2000$ en poche, soit toutes nos économies.

Malgré toute sa volonté, mon père, aujourd'hui décédé, n'a jamais appris le français. Il faut dire qu'il était malheureusement analphabète dans sa langue natale, le portugais. Ma mère, aujourd'hui, se débrouille, mais je suis loin d'être convaincu qu'elle passerait votre test, étant elle aussi analphabète.

Ça n'a pas été mon cas. Nouvel arrivant, la loi 101 s'appliquait à moi. J'ai appris le français, complété le secondaire, le collégial et un baccalauréat en administration. Je suis aujourd'hui CPA-CGA et je travaille comme contrôleur de gestion dans une importante coopérative québécoise.

Quant à mes soeurs, bien qu'elles n'aient pas eu la même chance d'étudier que moi, étant plus âgées à leur arrivée, elles parlent toutes très bien français. De leurs enfants (tous nés au Québec), trois sont des universitaires, un a démarré sa propre entreprise et tous sont de fiers citoyens québécois parlant la langue de Molière.

Selon votre proposition, au terme de trois ou quatre ans, vous auriez renvoyé (je ne sais où) ma mère, mon père, leur fils et leurs quatre filles. Avec pour conséquence d'envoyer aussi ailleurs leurs 10 enfants et neufs petits-enfants.

Est-ce bien cela votre souhait, M. Legault?