L'annonce récente à l'effet que les forces spéciales canadiennes ont retourné le feu contre les troupes du groupe État islamique a causé une tornade politique qui, malheureusement, occulte la réalité sur le terrain.

Il est important de rappeler les faits afin de mieux prendre la mesure de la contribution canadienne. Les troupes du groupe État islamique ont rapidement déferlé sur le nord de l'Irak, mettant l'armée irakienne en déroute dans cette partie du pays. Très tôt, cette poussée a même menacé la capitale irakienne, obligeant les dirigeants de ce pays à sonner l'alarme et à demander une aide internationale afin d'endiguer cette horde barbare.

Les États-Unis ont pris l'initiative de former une coalition dont le but stratégique est relativement modeste: freiner l'avance du groupe État islamique afin de permettre une meilleure préparation des troupes irakiennes devant se lancer dans une contre-attaque et ainsi reprendre le terrain perdu.

La contribution canadienne à cette coalition a été confirmée le 5 septembre dernier; il s'agissait initialement d'un déploiement de plusieurs dizaines de membres des forces spéciales canadiennes en Irak, pour conseiller le gouvernement irakien et aider les forces irakiennes; toutefois, l'annonce de ce déploiement stipulait qu'il ne s'agissait pas d'une mission de combat, une précision encore valide à ce jour.

La doctrine d'utilisation de forces spéciales pour une mission de combat se résume par le vocable un peu hermétique d'action directe. Ce terme regroupe toutes sortes d'opérations telles que des raids, des reconnaissances stratégiques en territoire ennemi, la capture d'un site d'intérêt stratégique, etc. Il s'agit donc d'actions où la confrontation directe avec la force est recherchée et constitue même le noyau dur de la mission.

La désignation de cible avec des lasers est une tâche aidant directement les troupes irakiennes et ne constitue pas une action directe selon le lexique doctrinaire. Le déploiement de ces équipes de désignation de cible se fait normalement à l'intérieur d'un secteur sécurisé par les troupes irakiennes; de plus, les appareils de désignation offrent la capacité d'opérer à distance sécuritaire par rapport à la cible. Cette tâche est vitale pour venir en aide aux troupes irakiennes tout en assurant un meilleur degré de précision pour les frappes aériennes de la coalition, minimisant ainsi les probabilités d'une frappe fratricide sur des troupes combattant le groupe État islamique ou sur les populations civiles.

Il est important de souligner le fait que les Forces armées canadiennes ont levé le voile sur les opérations menées par les forces spéciales alors que les forces spéciales d'autres pays se réfugient dans un mutisme complet concernant leurs opérations.

Un équilibre délicat doit être maintenu entre le besoin d'informer et la sécurité des soldats accomplissant des missions périlleuses, où le danger ne se limite pas seulement à la proximité d'une ligne de front souvent mal définie, sinon inexistante. Les généraux canadiens devraient être félicités pour leur candeur qui semble malheureusement avoir ouvert une boîte de Pandore!