À l'approche de nos fêtes nationales, voilà que me reviennent des questionnements de circonstance: que fêtons-nous au juste? Pour le 1er juillet, c'est clair. Mais pour le 24 juin, la question demeure entière et l'ambivalence règne. Qui aura le coeur à la fête?

À l'origine, nous fêtions la Saint-Jean-Baptiste, une fête religieuse, célébrée dans plusieurs pays, possiblement apportée ici par les premiers colons. Plusieurs se souviendront des défilés de notre enfance, avec le petit blond frisé et son mouton, qui marquaient l'arrivée du solstice d'été. Devenue la Saint-Jean, la fête des Canadiens français, l'événement avait adopté peu à peu un caractère plus laïque - plus rassembleur - , tout en gardant cette façon de souligner la présence francophone au Canada, et notre solidarité.

Depuis le 7 avril 1984 cependant, depuis qu'un gouvernement dirigé par le Parti québécois a donné le mandat de coordonner l'ensemble des festivités au Mouvement national des Québécoises et Québécois, quelque chose a changé, insidieusement. Des groupes se sont approprié la fête. Exit les Canadiens français, les francophones du reste du Canada, dont plusieurs continuent de célébrer la Saint-Jean, alors que les Acadiens ont choisi une autre date.

Je n'ai plus le coeur à la fête. Je me sens exclue de ce qui, aux frais de toute une population, semble n'être devenue qu'une tribune pour tous ceux qui veulent nous faire part de leur profession de foi indépendantiste, comme c'est encore arrivé en 2013.

Comment en sommes-nous arrivés là? Cette fête devrait pourtant être la nôtre, celles des francophones et - depuis que la Saint-Jean est devenue la fête du Québec (1984), de ceux qui ont choisi de vivre ici. Et pourquoi faut-il qu'au Québec, tout soit qualifié de «national» ? Ne pourrait-on pas simplement souligner la journée ou la fête du Québec, tous ensemble?

Le détournement auquel nous avons assisté, muets le plus souvent, s'est produit dans bien d'autres domaines, souvent illustré par le choix des mots. Entre autres, notre «Vieille capitale» a disparu au profit d'une deuxième «capitale nationale», le désir d'autonomie dans le secteur agricole est devenu une «souveraineté alimentaire», le MBAQ est devenu un «Musée national des beaux-arts du Québec»...

Notre nouveau premier ministre a tenu à se réapproprier notre drapeau, l'affichant fièrement sur le revers de son veston. Signe d'espoir peut-être. Mais pas encore pour le ton qu'on donne à la fête nationale, qui pourrait redevenir la fête du Québec, une fête que tous pourraient célébrer et qui marquerait notre souhait de vouloir vivre ensemble. Pour peu que nous trouvions à qui confier le mandat de l'organisation...

D'ici là, bonne fête à tous les Québécois.