La Charte des valeurs proposée par le gouvernement du Parti québécois est une initiative essentielle, mais incomplète. Pour avoir la portée qu'elle se doit, une Charte des valeurs doit couvrir l'ensemble de la condition humaine. Par exemple, définir notre manière de vivre en harmonie avec la nature, promouvoir la tolérance envers la différence, le respect du bien commun, la responsabilisation du citoyen, la solidarité envers les personnes désoeuvrées, etc.

En focalisant sur la laïcité, la Charte est apparue comme une politique défensive plutôt que rassembleuse. Il ne suffisait pas de dire aux croyants : «vous avez tort». Il fallait plutôt les inviter à mettre leur sens du sacré au service du vivre ensemble. La société a besoin, plus que jamais, d'enrichir son espace spirituel.

Les concepteurs de la Charte qu'on s'apprête à étudier en commission parlementaire font partie de la génération des soixante-huitards qui ont contribué à déconstruire nos traditions et qui ont ouvert les portes toutes grandes à la société de consommation que l'on connaît aujourd'hui.

En voulant empêcher l'intrusion de dogmes religieux jugés rétrogrades et discriminatoires envers les femmes, le gouvernement en est venu à cibler un groupe en particulier au point que le débat a tourné essentiellement autour du port des signes religieux ostentatoires, notamment celui du voile chez les musulmanes.

L'intention de créer un espace égalitaire s'est transformée aux yeux de plusieurs comme une politique attentatoire à saveur ethnique. Il peut être louable de vouloir indiquer clairement aux citoyens de toute origine qu'il n'y pas de place dans l'espace public québécois pour des valeurs qui légitiment l'infériorité d'un sexe par rapport à l'autre et l'utilisation de la violence au nom des croyances religieuses, mais il ne faut pas que l'action pour la contrer nous replonge dans des guerres de religion. La raison d'être d'une Charte des valeurs est d'unir pour mieux bâtir, non de diviser.