Dans quelques jours, la Grande-Bretagne accueillera le 39e sommet du G8 au Lough Erne Golf Resort d'Enniskillen. Comme chaque année, on assistera encore à diverses manifestations, on entendra bien des critiques sur les coûts d'organisation et la rencontre se terminera avec une valse de promesses!

Mais, au-delà de tous ces éléments, c'est surtout la pertinence du G8 qui sera à nouveau remise en question: sur le plan de sa structure et surtout, sur le plan de sa représentativité des nouvelles réalités économiques mondiales.

Sur le plan de la structure, bien des choses ont changé depuis le premier sommet de Rambouillet en 1975. Créé sous l'impulsion de l'ancien chancelier allemand Helmut Schmidt et de l'ancien président français Valéry Giscard d'Estaing, ce club select (que la Russie a rejoint en 1997), se voulait un cadre simple et informel où les leaders mondiaux pouvaient échanger sur les grands enjeux économiques.

Mais, très rapidement, ce cadre s'est transformé en une structure bureaucratique de plus en plus imposante. À titre d'exemple, les délégations qui accompagnent chacun des pays participants lors du sommet sont devenues gigantesques, voire démesurées: des centaines de personnes par pays alors qu'elles étaient à peine une dizaine au tout début.

Par ailleurs, des rencontres ont lieu maintenant tout au long de l'année: d'un côté, entre les hauts fonctionnaires, «les sherpas», afin de discuter des points à mettre à l'ordre du jour du Sommet, et de l'autre, des réunions ministérielles entre les ministres des Finances ainsi qu'entre les ministres des Affaires étrangères. Si bien qu'on assiste à une véritable mutation bureaucratique qui vient bouleverser complètement le cadre intime et personnalisé visé au départ par cette instance.

Sur le plan de la représentativité, la prétention de ce forum à définir les grandes orientations mondiales pose elle aussi problème. Depuis les deux dernières décennies, on assiste à un nouvel équilibre économique mondial où des puissances émergentes comme les BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud) occupent une place de plus en plus prépondérante.

Depuis 1993, la part de la richesse mondiale détenue par ce groupe de pays a presque doublé, passant de 15% à 28%, alors que celle des pays du G8 (sans la Russie) a chuté de 51% à 37%. Pendant la même période, les États-Unis ont vu leur part régresser (de 23% à 18%) alors que celle de l'Inde a doublé (de 3% à 6%) et celle de la Chine a plus que triplé (de 5% à 16%). Enfin, durant les dernières années, le Brésil s'est hissé à la 7e place dans le classement économique mondial, pendant que la Chine s'est accaparée du deuxième rang, tout juste derrière les États-Unis.

En ce sens, la reconfiguration du pouvoir économique à l'échelle mondiale à laquelle nous assistons depuis les deux dernières décennies ne fera que s'accentuer et viendra remettre davantage en question la pertinence du G8 tel qu'il est édifié actuellement: une instance quelque peu dépassée, voire nostalgique, qu'il faudra repenser afin qu'elle soit plus efficace et plus représentative des nouvelles réalités mondiales, notamment économiques.

Comme le mentionnait si bien, M. Giscard d'Estaing dans un entretien au journal Le Figaro il y a quelques années: «Lorsque le PIB de la Chine et celui de l'Inde auront dépassé les niveaux de tous les membres du G8, à l'exception des États-Unis et peut-être du Japon, ce qui ne saurait beaucoup tarder, il sera bon de rechercher une forme plus adaptée de gouvernance économique mondiale. Rambouillet aura fait son temps.»

Et comment!