Les sondages récents le montrent bien, Justin Trudeau a le vent dans les voiles. Non seulement aucun autre candidat dans la course à la direction du Parti libéral du Canada ne semble bénéficier d'une machine de campagne comparable à la sienne, mais il est fort probable que le fils de l'ancien premier ministre canadien suivra les traces de son père.

Le Parti conservateur et Stephen Harper ont bénéficié du contexte du scandale des commandites pour se faire élire début 2006 car, avouons le franchement, ce n'est pas le charisme de M. Harper qui a mené son parti au pouvoir. Depuis, les Canadiens souffrent d'une soif intense de charisme sur la scène fédérale, exacerbée par le triste départ de Jack Layton.

Ce déficit de charisme au Canada est l'un des éléments qui expliquent la vitesse de croisière de la campagne de Justin Trudeau. D'autres éléments s'y ajoutent : l'échec retentissant du « fédéralisme d'ouverture » promis par M. Harper au début de son premier mandat, les piètres performances du PCC en matière d'unité canadienne, l'absence de fédéralistes crédibles au Québec, une réforme de l'assurance-emploi impopulaire dans l'Est du pays, l'orientation idéologique controversée des politiques canadiennes en matière d'environnement et de politique étrangère, et bien d'autres encore.

Voilà le contexte idéal pour un candidat comme Justin « poster boy » Trudeau pour se lancer dans la course. Le vent de fraîcheur amené par M. Trudeau grise les libéraux d'un océan à l'autre et redore le blason à la fois de l'option et de la politique fédérale au Québec. De la jeunesse, du charisme, de l'ambition : enfin! Mais qu'en est-il de la vision que Justin entretient pour la fédération canadienne ?

Le jeune Trudeau ne compte pas une feuille de route impressionnante. Il tire profit donc sur l'incapacité du PCC à mobiliser les électeurs autour d'une vision commune. Mais que propose-t-il de concret aux Québécois et aux Canadiens? Mis à part ses déclarations controversées sur les règles de la démocratie, on peut se demander - avec Marc Garneau - ce que celui qui s'apprête vraisemblablement à être élu chef du PLC avec moins de 50% des votes des membres de son propre parti a à proposer... 

Lors d'une récente visite au Nouveau-Brunswick, Trudeau a timidement mentionné un engagement à annuler la réforme de l'assurance-emploi du gouvernement Harper si les libéraux étaient portés au pouvoir. Outre le caractère éminemment électoraliste de cette déclaration, elle est symptomatique de son manque de vision.

Revenir en arrière serait sans doute une décision populaire, voire même souhaitable, mais qu'en est-il du besoin de réforme de l'assurance-emploi lui-même? Quelle politique proposerait-il pour mettre la machine fédérale au service des économies des provinces maritimes et du Québec et ce, sans s'attirer les foudres des provinces riches? Comment s'attaquer au problème de la « maladie hollandaise », décrié par le NPD à la suite des complaintes provenant de l'Ontario, et qui fait en sorte que le développement des hydrocarbures dans l'Ouest se fait au détriment des économies des provinces de l'Est?

Plus encore, que propose Justin Trudeau pour intégrer le Québec dans le giron constitutionnel canadien? Souhaite-t-il encore nier la souveraineté démocratique de l'Assemblée nationale du Québec et la laisser subordonnée aux tribunaux canadiens? Que compte-t-il faire pour remédier aux injustices criantes concernant le déclin du français dans les institutions fédérales? La liste des questions que l'on pourrait adresser au futur chef du PLC est encore bien longue.

Alors, M. Trudeau, dites-nous : à quoi ressemblera votre fédération canadienne?