À la suite de l'entente de principe obtenue hier matin entre la LNH et l'AJLNH, plusieurs analystes tenteront de déterminer qui de Gary Bettman ou de Donald Fehr aura remporté la mise sur deux fronts, soit le meilleur contrat pour ses membres, ainsi que la toujours très populaire bataille de l'opinion publique.

Au niveau du contrat, si l'on tient compte de l'investissement initial des deux parties, soit près de 35 matchs annulés, j'ai la vague impression qu'on tardera à déterminer exactement qui des deux parties en sort grande gagnante. En réalité, seuls les propriétaires et les joueurs seront vraiment en position de répondre à cette question. Ont-ils atteint leurs objectifs d'affaires? Si tel est le cas, peu importe ce qu'en diront les analystes, les acteurs principaux du conflit, eux, sauront.

En ce qui concerne la bataille de l'opinion publique, ça me semble un peu plus clair: c'est une cinglante défaite pour les deux parties.

Peu importe le domaine, un conflit de travail qui dure seulement quelques jours est un conflit qui peut faire un gagnant ou un perdant dans l'opinion publique, car l'émotion demeure à son paroxysme tout au long du conflit et dicte un jugement final de la part des consommateurs et des observateurs. Les passions se déchaînent à tenter de jeter la responsabilité sur l'une ou l'autre des parties.

À l'opposé, un conflit de travail qui s'éternise dans le temps (113 jours se qualifient pour cette catégorie...) est un conflit qui dégonfle les passions. Le consommateur en vient à perdre de l'intérêt. Et la nature humaine ayant horreur du vide, à ce désintéressement s'ajoute habituellement un transfert d'habitudes qui peut avoir des conséquences néfastes à long terme.

Comprenons-nous bien: l'amateur pur et dur, le partisan fini de Winnipeg, de Kapuskasing ou de Montréal, celui qui rêve, mange et respire hockey, retombera rapidement sur ses patins. Il sera davantage passionné qu'il ne l'a jamais été. Les ailes de poulet et la bière du samedi soir n'auront jamais eu si bon goût.

Le problème, c'est l'autre. Celui qui fait partie de l'autre 50% d'amateurs, celui qui s'intéresse au hockey, mais que ce conflit entre multimillionnaires révolte tout simplement. Celui-là reviendra probablement aussi au bercail un jour, mais ce sera plus long. Pour une 3e fois en 18 ans, il vient de subir les désagréments d'une situation sur laquelle il n'a aucun contrôle.

Et voilà exactement où se situe le danger pour la LNH et l'Association des joueurs.

Car justement, cet amateur moyen va finir par comprendre qu'il a un certain contrôle sur la situation. Celui de consommer, ou non, de ce produit. Et c'est là où la LNH et l'AJLNH auront à intervenir rapidement et conjointement. Afin de maximiser l'impact d'une telle campagne de relations publiques, les deux parties auraient intérêt à travailler conjointement afin de récupérer les parts de marchés qu'elles ont gaspillées, probablement au profit d'autres produits.

Les deux parties en présence doivent toutes deux assumer une part de responsabilité dans ce conflit qui a miné la crédibilité du produit auprès d'un segment de la population. Les deux parties doivent donc se retrousser les manches afin de travailler à convaincre les consommateurs du sérieux et du professionnalisme de ce produit qu'est la LNH.

Voilà un travail qui, malheureusement, prendra un certain temps. Et c'est sans compter le lien de confiance patrons/employés qui en a pris pour son rhume. Ce genre de conflit de travail affecte toujours les relations pour une certaine période de temps. D'un côté comme de l'autre, on tient habituellement l'autre partie responsable de ses malheurs. Et c'est encore plus vrai quand ils se chiffrent à coups de millions.