Dans les couloirs du Parti québécois, on aimait penser que le gouvernement Marois était plus progressiste, plus social-démocrate, plus pro-innovation et plus soucieux de l'environnement que le gouvernement fédéral, le PLQ ou la CAQ. Comment comprendre l'idéologie derrière ces coupes aveugles des péquistes dans les budgets du Fonds de recherche du Québec, les fonds de base des universités et les effectifs pointus de certains ministères-clés?

L'annonce par le gouvernement Marois d'une diminution de 30% du budget du Fonds de recherche du Québec-Nature et technologies en 2013-2014 a surpris la communauté scientifique. Outrés, les chercheurs rappellent dans une pétition que cette réduction aura des répercussions négatives sur la recherche et la formation de chercheurs au Québec. Une réduction de 30% saperait irrémédiablement les fondements de la recherche et de la formation avancée, et affecterait durablement la position du Québec en recherche et développement, au Canada comme sur la scène internationale. À court terme, cette mesure toucherait l'emploi de personnel de recherche, le niveau de recrutement et les allocations aux étudiants de niveau supérieur.

C'est une tuile de plus qui s'ajoute aux compressions budgétaires de plus de 140 millions de dollars pour l'année en cours dans les universités québécoises. Les recteurs se sont dits incapables d'assumer une baisse rétroactive du budget. Par expérience, les chercheurs savent qu'ils seront appelés à assumer plus de frais indirects. Mais comment le faire, si les fonds sont coupés?

Au ministère des Ressources naturelles, pourtant un secteur-clé pour le développement économique du Québec et le développement de programmes d'efficacité énergétique, on s'attend à une réduction du budget de 22%. Aussi bien le fermer. Hydro-Québec devra couper 2000 postes. Où va-t-on couper? Des investissements en transports en commun sont retardés. Et ainsi de suite.

L'attitude du gouvernement fédéral envers la promotion de la connaissance a été vivement dénoncée. Il est vrai que les dépenses en R&D se sont stabilisées depuis l'arrivée des conservateurs au pouvoir. La faute revient surtout au secteur industriel. Mais contrairement à ce que l'on pense, le financement de la recherche académique en science et génie n'a pas fléchi: augmentation par un facteur de 20% dans la période 2006-2011.

Au Québec, à la veille des grandes compressions de la période 1995-2000 au fédéral comme au provincial, les dépenses en R&D par rapport au PIB au niveau supérieur étaient de l'ordre de 0,67. Avec l'arrivée des libéraux au pouvoir, ce taux s'est stabilisé autour de 0,9, y compris pour la période difficile de 2008-2011. Le financement des universités s'est également accru. Qui a raison?

Qui défend la connaissance au Québec?

Comme mes confrères, je pense que cette baisse de fonds à la recherche remet en question le modèle québécois en politique scientifique. On peut se demander si à terme, la communauté peut se remettre d'une telle blessure. Avec le PQ au provincial et les conservateurs au fédéral, la recherche et la promotion de la connaissance vivent la période le plus sombre de l'histoire des 50 dernières années, pire que celle des années 1995-2000, où le PQ était également au pouvoir.

Ça n'a rien à voir avec le fait que ce gouvernement soit minoritaire. Ce parti au pouvoir est soudainement pris de panique pour atteindre le déficit zéro, quitte à remettre en question les pratiques élémentaires de gouvernance, comme imposer la rétroactivité. Alors que seule l'économie de très court terme semble être à l'ordre du jour, est-on conscient que l'on est en train de fragiliser les bases du quatrième niveau de formation, la recherche? Une réflexion s'impose sur cet état d'égarement incompréhensible.