Faire des compressions de 50 millions dans les chirurgies sans réduire les services tient de la pensée magique.

Encore une fois, les hôpitaux performants seront pénalisés. Bienvenue dans notre Québec frileux et antiélitiste où il n'est pas bon d'être trop entreprenant, trop performant, trop visible.

L'hôpital où je travaille a développé au fil des ans de nombreuses expertises qui ont contribué à bâtir sa réputation et en ont fait un centre tertiaire reconnu qui reçoit constamment des patients de tout le Québec.

Dans cet hôpital, je dirige l'équipe experte en dysfonction vésicale et incontinence urinaire. Depuis 20 ans, nous travaillons fort pour offrir un niveau d'évaluation et de traitement tout à fait exceptionnel dans notre système de santé. À la suite des directives de restrictions financières du gouvernement Marois, nous ne pouvons plus offrir de neuromodulateurs (pace maker) vésicaux, qui coûtent cher, j'en conviens (12 000$/patient), mais que nous sommes les seuls à offrir à Montréal (il n'y a que deux centres au Québec).

Depuis quelques semaines, nous ne pouvons plus implanter de sphincters artificiels (10 500$/patient) chez les hommes qui, après une chirurgie pour cancer de la prostate, perdent leurs urines. Là encore, nous sommes l'un des deux centres d'implantation à Montréal.

Finalement, la plus récente compression touche les électrodes de chirurgie au laser pour la prostate, même si elles ne coûtent que 850$/patient.

Tous ces programmes d'excellence qui ne sont pratiquement pas disponibles ailleurs au Québec sont gelés jusqu'à la prochaine année financière débutant le 1er avril 2013. Il faut savoir que les patients dont la chirurgie est repoussée jusqu'à cette date attendent déjà depuis plusieurs mois. À compter d'avril, ces programmes seront limités à un nombre précis de cas par an.

Je sais que plusieurs de mes confrères pourraient rédiger la même lettre et dénoncer des coupes tout aussi indécentes dans leurs programmes spécialisés; s'ils ne le font pas, c'est que devant tant de changements dans notre système de santé déjà déficient, ils préfèrent passer leur temps à chercher ailleurs ou à s'en aller.

Alors, M. le ministre Réjean Hébert, enlevez vos lunettes roses et regardez la triste réalité dans laquelle vous plongez notre système de santé au Québec. Vous ne pourrez plus dire que vous ne coupez que des postes administratifs.