Le 14e Sommet de la Francophonie qui vient de se tenir à Kinshasa, en République démocratique du Congo, marque indéniablement la fin d'une époque et impose que nous soyons créatifs pour tracer les contours d'une toute nouvelle dynamique : axiomes redéfinis de coopération et de concertation, cohérence politique au profit de la société civile et du bien commun des peuples, coordination active en matière de culture et d'échanges commerciaux.

Le passage du président français François Hollande à Dakar (ville phare et courroie entre l'Europe, l'Afrique et les Amériques), ainsi que le ton et le contenu de son discours (et sa visite du mémorial de l'île de Gorée), avant d'arriver à Kinshasa, a donné le ton à cette rencontre périodique des dirigeants des principaux États et des représentants élus des nations qui ont en commun langue, histoire et projets en francophonie.

Il est aussi extraordinaire d'observer combien Mme Pauline Marois, accompagnée du ministre responsable des relations internationales et de la francophonie, M. Jean-François Lisée, combien la première ministre du Québec a réussi avec brio son premier test sur la scène internationale.

Kinshasa va signer la pose d'un jalon important, sous le signe du changement, dans le contenu et dans les formes des relations profondes qui se tissent depuis un demi-siècle entre les principaux intervenants de la planète francophone.

Sans mélancolie ni lyrisme, il est important d'avoir en fond d'écran de réflexion les principes que les fondateurs (Léopold Sédar Senghor, Hamani Diori, Habib Bourguiba) et les actions que leurs héritiers jusqu'à nos jours, ont défendues et qui permettent désormais à la langue, à la culture et aux espaces francophones sur tous les continents d'exister et mieux, de trouver un souffle nouveau.

Dans un contexte passé du bipolaire au multipolaire, dans un monde qui se décompose et se recompose au rythme des bonds technologiques et des initiatives de plus en plus confectionnées par les nouvelles générations issues des bassins d'innovation qui germent depuis bientôt 10 ans dans les grandes métropoles multiculturelles et en majeure partie dans les espaces émergents, la francophonie a une vocation nouvelle à créer et des moyens stratégiques à inventer.

La Francophonie est multiple : communauté de culture et d'esprit, confédération constituée sur une logique d'échanges et de partage des valeurs d'égalité, des pratiques de solidarité et de démocratie, fiducie commune enracinée dans les sociétés traditionnelles et modernes à la fois, mais aussi la francophonie incarne l'idée d'une société ouverte sur le monde au sein duquel elle joue un rôle stabilisateur et souvent créatif.

Plus spécifiquement, la redéfinition des axiomes en matière de coopération, de concertation et d'action politique, au sein des instances de la francophonie, est un processus au sein duquel les forces en présence, elles-mêmes, se repositionnent ou devraient le faire.  Le centre de décision dans l'univers de la praxis et sur les axes de réflexion, en Francophonie, n'est plus motivé, ne sera plus dirigé ni impulsé depuis la France seulement, mais déjà et dorénavant, il est de plus en plus le fait de la collégialité.

Dans cette configuration nouvelle, l'histoire de nos cycles politiques place le Québec en excellente posture.  Au cours de la période transitoire que nous vivons entre le Sommet qui vient de s'achever au Congo dit démocratique et le prochain qui aura lieu à Dakar, Sénégal, en 2014, les chantiers sont nombreux.  Cette période est propice pour les nouvelles propositions et pour le redressement dans la gestion des opérations ainsi que dans le redéploiement, dans l'octroi et dans la distribution des ressources financières et des ressources humaines.  Pour l'avènement et la réussite de ce nouvel élan, Québec a une carte spécifique à jouer : reprise et plein exercice de ses responsabilités.

Dans la foulée et la mise en action d'un processus nouveau de transactions au sein de la Francophonie (création de l'Agence québécoise de coopération internationale), de la part des opérateurs et des bénéficiaires, du côté des dirigeants et de celui des populations à la base; des changements se précisent qui devront être effectués.  Le Québec a une place privilégiée à occuper, car son action sera déterminante dans l'aboutissement et dans la mise en vigueur d'une dynamique nouvelle et salvatrice pour la francophonie universelle.

Nouveaux mobiles idéologiques en matière de coopération multilatérale, saisie et traduction dans les réalités nationales et régionales des dimensions politiques au sein des champs collectifs d'avenir à valoriser que demeurent l'éducation, la vie internationale y compris la stratégie géopolitique des zones d'influences socioéconomiques et philosophiques, la culture, la défense et l'expansion des technologies dans l'économie et le développement durables.

Tels nous apparaissent aujourd'hui, de manière sommaire, les défis immédiats qui s'offrent au gouvernement du Québec dans un secteur spécifique où son action est attendue. Au coeur de l'ensemble polyphonique international, le Québec a la responsabilité de sa propre partition à écrire et à jouer.