La diversité est l'une des richesses qui rendent notre monde aussi fascinant. Notre société est composée d'une pluralité de cultures, d'idéologies, de personnalités; des scientifiques pragmatiques aux artistes idéalistes.

Dans le domaine des croyances, on retrouve aussi de tout pour tous; certains croient que le dentifrice soigne les brûlures, que le vinaigre tue les poux et que dormir la tête vers le nord favorise un sommeil réparateur. Rien de bien vilain, sinon un risque d'échec et de déception assez élevé.

Malheureusement, les croyances et pratiques spirituelles émergentes ne font plus dans le remède de grand-mère et certaines provoquent même la mort, comme celle, tragique, de Chantal Lavigne.

Le charlatan n'est visiblement pas un animal en voie d'extinction et La Presse nous révèle depuis quelques jours l'ampleur du phénomène des gourous. Ces individus, souvent intelligents et charismatiques, exploitent la vulnérabilité de gens fragiles en quête de réponses, de solutions et de remèdes à leurs souffrances et abusent des droits fondamentaux que leur confère notre système.

Les libertés d'expression, d'association, de croyance et de religion sont en effet, et à juste titre, des valeurs chères à notre société. Mais la liberté des uns s'arrête là où celle des autres commence. Il importe donc de réfléchir aux façons de protéger ceux qui se retrouvent dans une position de faiblesse susceptible d'attirer les vautours, sans brimer les libertés individuelles ni tenter d'imposer une dictature de pensée.

D'abord, les pratiques qui touchent l'intégrité physique des individus devraient entraîner l'application de standards stricts ainsi que l'obligation de détenir un permis. Ce principe risque toutefois d'être plus difficile à appliquer qu'il n'y paraît puisque les gourous ne manquent pas d'imagination pour contourner les règles, comme l'a prouvé Nicole Ouellet en offrant des consultations téléphoniques afin de permettre à ses «patients» de se donner eux-mêmes les «soins».

Ensuite, il ne doit y avoir aucun compromis sur les orientations scolaires et le matériel utilisé dans nos écoles. Les outils d'enseignement doivent être neutres et objectifs, et le personnel qui «chasse les mauvais esprits des établissements» doit être mieux encadré et au besoin, sanctionné. Il est fondamental de protéger les enfants, que la naïveté et la candeur privent des facultés de jugement et de discernement.

Enfin, je crois aux vertus de la prévention et de la sensibilisation. Il faut mieux soutenir et entourer les patients à qui l'oncologue vient d'annoncer un diagnostic de cancer et les parents à qui le pédiatre vient d'apprendre que leur enfant souffre d'un trouble envahissant du développement. Le vide et la solitude sont deux grands maux de notre siècle et plusieurs personnes se tournent vers des gourous en raison de l'écoute, de la compassion et de l'empathie que ces charlatans leur témoignent et qu'ils ne retrouvent pas dans le réseau de soins traditionnel.

Les croyances et la spiritualité touchent à ce qu'il y a de plus profond chez l'humain, droit au coeur de son âme. Une âme, parfois fragile et souffrante, que les gourous torturent honteusement et impunément. Une âme faite d'intangibilité, de subtilité et d'intimité que l'on aura tout avantage à protéger avec respect, déférence et une infinie délicatesse.