Le monde médiatique du sport au Québec et au Canada vient de subir une commotion de plus cette semaine. Dans un livre, Éric Gagné, ex-lanceur étoile du baseball majeur, confesse publiquement son usage d'hormones de croissance.

Pour être sincère, on s'en doutait depuis la parution du rapport Mitchell, enquête sur le dopage effectuée en 2007 dans le monde du baseball américain.

On ne peut nier que pour le colosse de Mascouche, une démarche de ce type n'est jamais facile. Avouer publiquement une faute aussi grave, comme le faisaient jadis nos ancêtres sur le parvis des églises après la grande messe, demande beaucoup d'humilité. Du même coup, c'est aussi démontrer ce besoin immense de se voir accorder une rédemption par la société qui nous entoure. Jusqu'ici, je n'ai rien à redire et je trouve légitime que le récipiendaire 2003 du trophée Cy Young cherche à se libérer de ce joug destructeur.

Mais là où je suis en désaccord complet avec Éric Gagné, c'est lorsqu'il tente de diminuer son péché en incriminant insidieusement ses coéquipiers de l'époque. En effet, le gros «closer» se permet d'affirmer que 80% des joueurs des Dodgers faisaient usage d'hormones de croissance comme lui.

Il est possible que ce fût le cas. Le problème est que cette forme d'accusation est englobante et imprécise, en plus d'être empreinte d'une certaine lâcheté.

Tous les porte-couleurs de l'édition des Dodgers visée par Gagné sont donc susceptibles d'avoir pris des produits dopants. Le releveur en a dit assez pour que tout le monde soit suspecté tout en ne pouvant être incriminé avec certitude. Ceux qui feraient partie des 20% des non-utilisateurs doivent être furieux, car qui va les croire maintenant? Et pour chacun d'entre nous, quelle serait notre réaction si un de nos confrères de travail, avouant publiquement un délit grave, invoquait que la majorité de ses collègues avaient fait comme lui?

L'autre revers à cette médaille, c'est la lâcheté qui vient avec l'usage d'un argument comme celui-ci. Dans l'espoir de nous faire accepter un peu plus le geste qu'il a posé, Éric Gagné a choisi la délation aléatoire. Il aurait pu nous dire simplement: «Je me repends, je sais bien qu'il y en a d'autres qui on fait comme moi, mais ce n'est pas une excuse, je n'avais pas à suivre ce chemin où je fraudais ceux qui sont propres, mais aussi ma propre personne.»

Éric Gagné a réalisé des exploits dans le baseball majeur. Il a été source de fierté pour les Québécois et les Canadiens. Certes, il n'aura pas été le seul à céder à la tentation du dopage.

L'homme est doté d'un physique imposant, il ferait peur à la plupart d'entre nous. Mais j'aurais pensé qu'il était du genre à affronter son destin comme un brave, sans se cacher derrière les autres.

Éric Gagné aura terni sa gloriole par une grande petitesse envers les compagnons d'armes qui l'ont épaulé sur la voie de sa renommée.