L'auteur est vice-président, développement corporatif, chez Exploration Typhon inc. Il est membre du conseil d'administration de l'Institut national des mines du Québec et ancien directeur général de l'Association de l'exploration minière du Québec (AEMQ). Il s'exprime à titre d'investisseur individuel.

Le 9 mai dernier, le gouvernement du Québec annonçait en grande pompe le lancement du Plan Nord. Ce vaste chantier de développement pourrait être dominé par un acteur important : l'industrie minière. D'ailleurs, c'est sur un site minier que le premier ministre a choisi de faire ce lancement, en présence de plusieurs représentants de l'industrie.

Au même moment, en secret, il mettait la touche finale au projet de loi 14. Rédigé sans aucune consultation officielle avec l'industrie de l'exploration minérale, ce projet de loi vise un objectif vraiment étonnant : l'interdiction des activités d'exploration minière en milieu habité au Québec (périmètres urbanisés, zones de villégiature). En effet, l'article 94 du projet de loi proclame que le gouvernement n'émettra plus jamais de titres miniers sur ces territoires. Il faut croire que l'activité minière n'est plus acceptable socialement dans le Québec habité.

Pour ceux qui détiennent déjà des droits d'exploration minière dans ces zones d'exclusion, le gouvernement refuse de les racheter. Il les informe plutôt qu'ils devront dorénavant demander la permission pour poursuivre leurs travaux à un nouvel intervenant, la municipalité locale. Même si un projet d'exploration a reçu les autorisations de différents ministères provinciaux et fédéraux ou d'organismes de surveillance comme le Commission canadienne de la sûreté nucléaire ou la Commission de protection du territoire agricole, il devra aussi obtenir l'appui du peuple.  Le gouvernement ne fait-il plus confiance à ses ministères et agences ? En cas de refus par la municipalité, la loi prévoit que le détenteur du titre ne recevra pas d'indemnité de la part de l'État. Des milliards de dollars déjà investis depuis près de 100 ans sur ces titres risquent donc de s'envoler en fumée.

Et candidement, le gouvernement répond à ces investisseurs floués que c'est la nouvelle façon de faire du développement durable au Québec. J'espère que le premier ministre a bien informé les investisseurs européens et asiatiques qu'il sollicite dans ses tournées pour vendre son Plan Nord. S'il ne le fait pas, les investisseurs canadiens et américains qui ont financé le développement minier québécois depuis 100 ans sauront bien informer le reste de la communauté financière sur la façon dont on les a arnaqués.

Cette façon cavalière de retirer à ces investisseurs des droits d'exploration accordés depuis presque un siècle dans certains cas, et de les soumettre à la volonté des municipalités locales qui, pour la plupart, n'ont même pas de carte géologique de leur territoire, reflète bien l'hypocrisie du gouvernement qui donne le territoire nordique à certains et enlève le sud aux autres. Robert Mugabe n'aurait pas fait pire. Un geste qui ne donne définitivement plus le goût d'investir au Québec.

Investisseurs qui misez sur le potentiel minéral du Nord québécois, ne vous réjouissez pas trop vite. Sachez qu'un titre minier québécois, ça ne vaut pas plus que la valeur du papier sur lequel il est constaté. Le projet de loi 14 en fait la démonstration claire et sans équivoque.