L'Angleterre le fait. L'Australie s'y est engagée. La Colombie-Britannique et la Nouvelle-Écosse aussi. Et considérant le temps qu'il faut ici pour instaurer ce type de changement, il est temps que le Québec commence à y réfléchir sérieusement s'il ne veut pas manquer le bateau.

À quoi ? À enseigner la programmation informatique aux élèves.

Cette idée doit être étudiée au Québec pour plusieurs raisons. On pourrait les résumer par une déclaration de Justin Trudeau qui est souvent reprise, mais qui s'applique bien ici : « parce qu'on est en 2016 ».

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Les élèves québécois sont déjà exposés à l'informatique en classe, quoique de façon inégale selon les écoles. Mais la vaste majorité d'entre eux se contente encore de naviguer sur l'internet et d'utiliser des logiciels faits par d'autres.

Cela signifie que tout un monde leur échappe. C'est dommage. Programmer un ordinateur, c'est lui donner des instructions pour lui faire exécuter ce que l'on veut. Les élèves qui s'y initient créent de petits jeux vidéo, font danser des personnages, commandent des robots. Ce pouvoir créatif est grisant.

Surtout, la science montre que ces projets modifient la façon de raisonner des élèves.

« Les personnes qui font de la programmation développent une structure de pensée qui va au-delà de la pensée linéaire et que ni la langue ni même les mathématiques ne peuvent développer », dit Margarida Romero, professeure au département d'études sur l'enseignement et l'apprentissage à l'Université Laval.

Ces capacités à diviser des problèmes en petits morceaux et à planifier des étapes pour atteindre un objectif serviront autant à un agriculteur qui planifie ses récoltes qu'à un entrepreneur qui veut conquérir un marché. L'idée d'enseigner la programmation n'est donc pas obligatoirement de former des armées de petits programmeurs, mais à tout le moins d'initier les enfants à une discipline qui leur ouvrira des horizons.

Le ministère de l'Éducation dit suivre « avec intérêt » les initiatives lancées ici et ailleurs. Il doit aller plus loin et lancer des consultations formelles. Alors que l'Angleterre a entrepris une vaste réforme destinée à introduire la programmation à tous les niveaux dès l'âge de 5 ans, la Colombie-Britannique a choisi une voie plus modeste avec un budget de 6 millions de dollars. C'est ce dernier modèle qu'il faut viser ici pour commencer.

Ceux qui choisissent de voir les obstacles en verront. La formation des enseignants, par exemple, est certes un défi. Mais il existe des outils en ligne, dont plusieurs gratuits, spécialement conçus pour initier les enfants à la programmation. Margarida Romero estime que deux heures suffisent pour former un enseignant à les utiliser.

Le manque d'ordinateurs ou leur désuétude dans certaines écoles devra être considéré. Et, oui, notre système scolaire jongle déjà avec plusieurs débats, dont ceux entourant l'anglais intensif au primaire et la réforme du cours d'histoire au secondaire. Mais les défis actuels ne peuvent justifier que l'on se prive de regarder d'autres réformes nécessaires à nos élèves.

Il n'y a pas de raisons pour que le Québec ne puisse faire des virages que la Colombie-Britannique et la Nouvelle-Écosse jugent essentiels et possibles à négocier. Le monde change, le curriculum québécois doit pouvoir s'y adapter. Sinon, c'est tout un problème qui nous attend demain.

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