Cette fois, André Lamontagne n'est pas tout à fait dans le champ. Malgré son impressionnant mauvais choix de mots, le ministre de l'Agriculture a mis le doigt sur un véritable problème en dénonçant la rigidité de la réglementation imposée aux petits agriculteurs.

La fin de semaine dernière, M. Lamontagne a comparé les inspecteurs du ministère de l'Environnement à des «ayatollahs». Selon lui, les normes seraient trop rigides. «À un moment donné, est-ce qu'on n'a pas viré fou?», s'est-il demandé.

Quand il s'agit de se tirer dans le pied, M. Lamontagne vise très bien...

Après avoir approuvé le congédiement de l'agronome et lanceur d'alerte Louis Robert la semaine dernière, le ministre a ainsi attaqué une fois de plus les fonctionnaires.

Le ministre conforte l'impression que pour les caquistes, ceux qui veulent protéger l'environnement sont des emmerdeurs radicaux. Et il blâme inutilement les fonctionnaires alors que le problème provient des règles et non de ceux qui les appliquent.

Mais ne réduisons pas notre analyse aux gaffes. Car sur le fond, M. Lamontagne a bel et bien défendu ceux qui prônent une agriculture à petite échelle. Soit ceux qui préconisent le contraire d'un modèle productiviste et industriel.

D'ailleurs, sa déclaration a été faite au congrès annuel de l'Union paysanne. Cela mérite d'être souligné : c'était la toute première fois qu'un ministre de l'Agriculture osait y participer.

L'Union paysanne a été fondée en contestation de l'Union des producteurs agricoles (UPA), le puissant monopole syndical. Ses membres sont de petits agriculteurs, souvent bio, qui veulent rompre avec la production intensive de monoculture. Ils privilégient plutôt une agriculture «dans le respect de la nature, des sols, des animaux et de l'environnement».

La réglementation québécoise est conçue en fonction des besoins des membres de l'UPA. L'Union paysanne s'en plaint depuis longtemps. Elle prétend que Québec lui impose des normes coûteuses et inutiles.

Par exemple, afin de prévenir les épidémies avec la volaille, les producteurs doivent remplir des rapports et subir des inspections. Or, l'Union paysanne soutient que le risque d'épidémie est plus faible dans les petits élevages extérieurs en basse-cour. Elle réclame donc pour eux un contrôle moins rigide.

Aussi, afin de prévenir la contamination de l'eau, l'épandage de fumier est restreint après le 1er octobre. Cette mesure sert entre autres à empêcher une porcherie de répandre du lisier sur du sol gelé, qui risque de ruisseler jusque dans les cours d'eau. L'Union paysanne souhaite que les petits producteurs aient des limites adaptées à leur faible volume.

Dans les deux cas, il s'agit d'un débat scientifique sur le risque environnemental. On ne le tranchera pas ici.

Le ministre ne s'est pas compromis. Il reconnaissait seulement que, de façon générale, la réglementation trop lourde nuit aux petits entrepreneurs.

À Québec, l'opposition profite de la maladresse de M. Lamontagne pour réclamer à mots couverts son congédiement. Mais en ne s'attardant qu'à cette gaffe, elle évite de se prononcer sur des enjeux de fond : faut-il adapter la réglementation aux petits producteurs? Incluant les quotas?

Ils sont là, les véritables enjeux.

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