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Il est en effet difficile de comprendre le yo-yo des projections budgétaires depuis quelques mois. On aimerait y voir plus clair pour comprendre où ira le gouvernement Legault.

En mars dernier, le gouvernement libéral projetait un déficit de 2,5 milliards (après versement au Fonds des générations). Il fallait donc puiser dans la réserve pour équilibrer le budget.

Puis, surprise, cet automne, le nouveau gouvernement caquiste a découvert qu'il hériterait finalement d'un surplus. Après six mois de l'année 2018-2019, le coussin s'élevait déjà à près de quatre milliards.

Enfin, hier, les attentes ont été un peu révisées à la baisse dans la mise à jour économique. Il y aura bel et bien un surplus en 2018-2019, mais il sera plus modestement de 1,6 milliard à la fin de l'année.

Cela fait tout de même une grosse différence. L'écart est de 3,4 milliards entre le déficit prévu dans le budget libéral et la nouvelle projection caquiste.

Deux questions se posent : d'où vient ce surplus, et que faire avec?

Dans sa mise à jour, le gouvernement Legault donne un aperçu de la provenance du surplus. En gros, les revenus seront plus élevés que prévu pour les recettes fiscales (+2,8 milliards) et les transferts fédéraux (+325 millions). Et le coût de la dette est plus faible que prévu (-248 millions). Reste à voir si ces bonnes nouvelles seront récurrentes. Et donc, si on peut réinvestir avec des dépenses récurrentes ou s'il faudrait plutôt mettre l'argent de côté pour la prochaine récession.

En campagne électorale, M. Legault a promis un équilibre périlleux : baisser le fardeau fiscal tout en améliorant les services. Hier, il a rempli la première promesse en donnant un peu d'oxygène mérité aux aînés (prestation de 200 dollars) et aux familles (hausse de l'allocation pour enfant et frein à la modulation des frais de garderie). Les caquistes ont aussi le grand mérite de vouloir éliminer d'ici la fin de leur mandat la malheureuse «taxe famille» des libéraux sur les garderies.

Ce coup de pouce aux familles et aux aînés n'est pas déraisonnable - au total, l'aide s'élèvera en moyenne à moins de 400 millions. Or, pendant qu'il empoche les surplus, M. Legault n'a rien annoncé encore pour améliorer les services. Rien pour les infirmières et les préposés aux bénéficiaires, dont il dénonçait les piètres conditions de travail. Rien non plus pour le manque de services aux élèves, pourtant sa grande priorité.

Bien sûr, M. Legault vient à peine de prendre le pouvoir. Il aura le temps de faire d'autres annonces, notamment dans le prochain budget au printemps.

Mais ce qui rend ces investissements urgents, c'est justement ce qui explique le surplus. Car l'excédent ne provient pas seulement de la hausse des revenus. Il vient aussi des dépenses plus faibles que prévu.

En éducation, le dollar promis n'est pas toujours dépensé à temps, à cause entre autres de la bureaucratie et de la pénurie de main-d'oeuvre. Pour embaucher des orthopédagogues, il faut que les candidats existent!

Plus M. Legault attend avant d'investir, plus il en payera le prix.

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