Ce sera l'Assemblée nationale plutôt que la Pologne. Entre sa rentrée parlementaire et un sommet climatique international, François Legault a fait son choix. Il restera au Québec début décembre.

C'est dommage, mais ce n'est pas un drame. Car le premier ministre aura bientôt de meilleures occasions pour démontrer que l'environnement le préoccupe.

En fait, il aura deux occasions à court terme. En appuyant le gouvernement Trudeau face à l'Ontario, la Saskatchewan et les autres provinces anti-tarification de carbone lors d'une rencontre prévue à Montréal le 6 décembre. Et aussi en pressant M. Trudeau de maintenir le resserrement prévu des normes de pollution de véhicules à partir de 2020 - Ottawa n'exclut pas d'imiter le récent recul américain.

M. Legault prouverait ainsi que son soudain intérêt pour l'environnement ou son appui à M. Trudeau ne relève pas que du marketing politique.

Depuis quelques jours, les libéraux, péquistes et solidaires déplorent que M. Legault n'assiste pas à la COP24 (24e conférence annuelle de l'ONU sur le climat), qui se déroule du 3 au 14 décembre.

Ce que l'opposition ne dit pas, c'est que le sommet commence durant la rentrée parlementaire, un conflit d'horaire dont François Legault n'est pas responsable. Ajoutons aussi que la prochaine COP24 n'est pas la plus importante.

Certaines rencontres climatiques sont cruciales, comme celles à Copenhague (2009) et à Paris (2015). D'autres sont plus techniques, comme la prochaine en Pologne. Elle servira surtout à négocier l'application des précédentes ententes, entre autres pour l'aide aux pays en développement. Ce travail technique se fait entre fonctionnaires. D'ailleurs, Justin Trudeau ne se rendra pas en Pologne, et la présence d'autres chefs d'État comme Emmanuel Macron n'est pas confirmée non plus.

Il est toutefois vrai que ces négociations ne constituent qu'un volet de la COP24. Comme à chaque rencontre climatique, un réseau de diplomatie climatique s'active en parallèle. Des provinces, villes et autres gouvernements non souverains s'y liguent pour faire pression sur les États. C'est justement là que le Québec exerce son influence. Il essaie de rallier d'autres gouvernements à son marché du carbone, promouvoir son hydroélectricité et parler de technologies vertes.

On peut donc regretter que M. Legault ne soit pas là pour faire ce travail, d'autant plus que l'exportation d'hydroélectricité était sa grande proposition environnementale. Et on peut aussi déplorer que le premier ministre ne profite pas de la COP24 pour se sensibiliser à la crise climatique. Car avouons-le, depuis la fondation de la Coalition avenir Québec, c'est un dossier qui semble l'indifférer.

En Pologne, le comptable Legault aurait pu côtoyer des scientifiques et des entrepreneurs - des gens de chiffres - qui saisissent l'urgence d'agir.

Au moins, sa ministre de l'Environnement, MarieChantal Chassé, s'y rendra, et cette immersion pédagogique lui sera tout aussi bénéfique.

Quant à M. Legault, il pourra être utile autrement au Québec, et même obtenir un premier gain environnemental avant la fin de l'année. Comment ? D'abord en venant en renfort à Justin Trudeau, qui a plus que jamais besoin d'aide pour contrer le discours conservateur qui se bat pour le droit de polluer gratuitement. Ensuite, en s'inspirant d'une petite victoire du Québec en 2009. À l'époque, la ministre de l'Environnement Line Beauchamp avait repris les normes californiennes pour limiter les émissions des véhicules. La pression du Québec et de la Californie avait contribué à faire bouger les gouvernements centraux à Ottawa et Washington. Cette fois, le combat consiste à convaincre les fédérations de ne pas abandonner le resserrement prévu des normes.

Si M. Legault mène ce combat, il aura réussi à faire avancer la diplomatie climatique québécoise sans manquer sa rentrée parlementaire.

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