La vague du commerce en ligne déferle sur le Québec comme ailleurs en Occident. On ne l'arrêtera pas en la repoussant des bras. Mais on n'est pas obligé non plus d'affaiblir les digues en regardant les dégâts s'accumuler.

C'est pourtant ce qui se passe depuis quelques années. Au Canada, on permet au commerce en ligne d'augmenter l'injustice fiscale, en ne percevant pas systématiquement les taxes. Et sur les grandes artères de Montréal, on nuit à nos commerçants, avec un aménagement urbain qui donne envie d'aller voir ailleurs...

Un bel exemple : la rue Sainte-Catherine. Elle se résume à un mot : désagréable, et ce, pour tous les usagers (voir l'éditorial de François Cardinal en écran 3).

Si on veut asphyxier nos artères commerciales, ce genre de laisser-aller est une bonne stratégie. 

Pour s'en convaincre, on peut lire le dernier rapport du Centre facilitant la recherche et l'innovation dans les organisations (CEFRIO).

On y apprend que les Québécois magasinent plus que jamais en ligne. En 2017, leurs achats sur l'internet dépassaient 9 milliards. C'est une hausse de 15 % en seulement deux ans. La moyenne de leurs achats en ligne en 2017 était de 867 $.

Le géant Amazon, qui empoche des milliards en offrant des conditions miséreuses à ses employés, accapare pas moins de 15 % des transactions. Il n'y a pas de mal à vouloir encourager un autre modèle...

La vague de fond du commerce en ligne n'a toutefois pas encore atteint l'ensemble de la population. On ne comptait que 11 % de consommateurs virtuels fréquents (25 achats et plus). Ils sont particulièrement composés de familles qui manquent de temps, ainsi que de consommateurs ayant un salaire élevé.

Bien sûr, le commerce en ligne simplifie la vie de plusieurs internautes, et il offre de nouvelles occasions à des entrepreneurs d'ici. Mais on peut s'en réjouir tout en s'inquiétant pour la vitalité de nos artères commerciales.

À cet égard, il y a trois consolations dans le rapport.

D'abord, certains des produits en ligne les plus populaires, comme les billets de spectacle ou d'avion, ne sont pas vendus par des magasins qui animent nos grandes artères. Dans ce cas, il n'y a pas de perte d'activité pour des rues comme la Sainte-Catherine.

Ensuite, nos commerçants réussissent à reprendre des parts de marché. En 2014, 35 % des achats en ligne étaient faits au pays. L'année dernière, cette proportion passait à 56 %.

Et enfin, la dernière bonne nouvelle, c'est que la frontière entre le commerce en ligne et le commerce en magasin est poreuse. La moitié des sondés se rendent en magasin pour regarder un article avant de l'acheter en ligne.

Il y a donc encore beaucoup de clients à attirer sur nos artères. Pour les convaincre de sortir de chez eux, les métropoles doivent rendre l'accès plus rapide, et la balade plus agréable. En faire un endroit où on essaie aussi de vivre, avec un peu d'agrément si possible.

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