Ce qui traîne se salit, surtout dans les terres arides du Moyen-Orient. L'offensive contre le groupe État islamique (EI) s'y embrouille face à une cible de plus en plus mouvante.

Samedi, le premier ministre Harper a fait une visite surprise au Koweït et en Irak. Le Canada a déjà prolongé sa participation à la coalition pour une année. Son objectif, « affaiblir » l'EI, reste flou.

On découvre maintenant les dangers d'un tel critère. Il est invoqué par d'autres alliés pour élargir la mission hors de la Syrie et l'Irak, rapportait la semaine dernière le New York Times.

Cela pose deux problèmes. D'abord, il devient difficile de savoir contre qui intervenir. Contre la franchise de l'EI installée dans le chaos libyen ? Contre d'autres sympathisants de l'EI, même s'ils ne reçoivent pas de soutien direct ?

Ensuite, si les alliés interviennent, il sera difficile de savoir où les dominos mèneront, et quand s'arrêter.

La région ressemble à une collection de poupées russes où s'emboîtent des conflits religieux, tribaux et géopolitiques hyper complexes. Mais la solution, elle, passe par une mathématique simple : ne pas faire recruter plus de terroristes qu'on en tue.

Le Yémen en constitue un bon exemple. L'État islamique n'y existait pas l'année dernière. Il a surgi du chaos à la fin de l'hiver.

Le président Hadi venait d'être chassé du pouvoir par des milices chiites soutenues par l'Iran. L'Arabie saoudite, ennemie de l'Iran, a formé une coalition avec l'aide des États-Unis pour bombarder ces milices.

Cette instabilité a favorisé un troisième groupe, la filiale yéménite d'Al-Qaïda, qui combat aussi les chiites. Certains de ces terroristes en auraient profité pour cibler des mosquées chiites, ce qui est proscrit par Al-Qaïda mais encouragé par l'EI. Le groupe EI a ainsi revendiqué pour la première fois des attentats au Yémen en mars.

Les bombes de la coalition saoudienne ont peut-être favorisé l'arrivée de l'EI, et il sera difficile de les en chasser. Cela commence à faire beaucoup de gens à bombarder...

Plus on élargit la mission, plus on s'enfonce dans un engrenage complexe, sans savoir où il mènera. Certes, l'EI est menaçant et dégoûtant. Le choix n'est pas entre l'humanitaire et les bombes, comme l'a prétendu le NPD. Il s'agit plutôt de trouver une intervention ciblée pour contenir la menace.

Cela ne se fera pas en créant le chaos et le désespoir, comme le font les bombes à fragmentation saoudiennes et les drones américains, qui tuent respectivement des civils chiites et sunnites. Et cela ne se fera pas non plus en fermant les yeux sur l'Arabie saoudite, dont les écoles coraniques fabriquent le combustible de ces conflits.

La haine.

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