À l'issue des élections législatives anticipées tenues dimanche en Grèce, Alexis Tsipras a salué la « victoire du peuple », « une victoire claire » qui lui permettra, assure-t-il, de poursuivre sa bataille pour défendre « la fierté du pays ».

En l'écoutant, on se serait cru pour un instant en juillet après l'annonce des résultats d'un référendum-choc. La population grecque avait alors massivement rejeté l'idée de se soumettre à une nouvelle série de réformes draconiennes en contrepartie d'une aide financière additionnelle des instances européennes.

Bien que ses élans oratoires aient des échos familiers, la position de M. Tsipras est aux antipodes de ce qu'elle était alors.

Le politicien de 41 ans, qui a prêté serment hier soir comme premier ministre, devra se charger d'appliquer un nouveau mémorandum encore plus sévère que celui qui avait été récusé en principe lors du référendum.

Le scrutin lui a permis de purger de sa formation - Syriza - les élus qui lui reprochaient d'avoir fait volte-face devant les créanciers à ce sujet. Et il pense désormais pouvoir légitimement se faire le maître d'oeuvre d'une stratégie de redressement axée sur l'austérité qu'il a décriée pendant des années.

Sa volonté d'assumer une telle tâche paraît énigmatique tant elle s'annonce éloignée de ses positions traditionnelles sur les questions économiques.

« Il passe son temps à s'excuser d'avoir signé le mémorandum en demandant pardon au peuple grec tout en s'engageant à le mettre en application », relevait il y a quelques jours dans le quotidien Le Monde un analyste grec, Stelios Stylianidis, qui évoque une « sorte de clivage dans sa conscience ».

Les autorités européennes semblent avoir peu d'énergie à ce stade à consacrer aux tergiversations intérieures d'Alexis Tsipras.

Passé les félicitations d'usage, le message postélectoral était hier sans ambivalence. Un mémorandum a été signé et il doit être mis en oeuvre rapidement.

« Il y a beaucoup de travail à faire et pas de temps à perdre », a résumé le président de la Commission européenne, Jean-Claude Junker.

L'Allemagne, qui récusait l'idée de réviser les mesures d'austérité exigées de la Grèce lorsque Syriza est arrivé au pouvoir une première fois en janvier, a poursuivi dans la même veine.

Le porte-parole de la chancellerie allemande, Steffen Seibert, a fait valoir que le mémorandum conclu avant l'élection avait été signé avec « la république hellénique » et qu'il demeure « totalement valable, même après une élection », écartant du coup toute modification potentielle de son contenu.

La volonté déclarée de M. Tsipras « d'humaniser » l'application du mémorandum semble avoir touché les Grecs, mais elle risque de se buter à l'attitude inflexible des créanciers du pays.

Ils doivent mener dans les prochains mois une première évaluation de la mise en oeuvre des réformes prévues avant de donner leur aval au déblocage d'une nouvelle tranche d'aide.

L'exercice laisse peu de marge aux autorités grecques, qui ne semblent pas non plus, du moins pour l'heure, en position d'obtenir une réduction substantielle de la dette colossale du pays.

Qu'Alexis Tsipras se manifeste sous son incarnation révolutionnaire ou pragmatique, l'austérité demeure la voie imposée.

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