À six mois du début des célébrations du 375e anniversaire de sa fondation, Montréal a le vent dans les voiles. Avec à la barre du navire un joyeux capitaine qui a mis le cap sur l'excellence.

Montréal, capitale de l'aviation, de l'innovation, de la mode, du design, des festivals, du savoir et même capitale de l'électrification (!). Aucun secteur n'échappe à la stratégie du maire pour se hisser au sommet des grandes métropoles.

Depuis Jean Drapeau, Montréal n'avait pas connu meilleur ambassadeur à l'international. Tant mieux, il a été élu pour ça, direz-vous. Oui. Mais pas seulement.

Une ville est habitée par des citoyens... pas des produits. En 1972, Melvin Charney a organisé une importante exposition au Musée des beaux-arts, Montréal, plus ou moins ?. Autres temps, autres moeurs, l'architecte disait alors qu'une métropole ne devait pas se comparer, mais se distinguer des autres cités. « Tant que notre façon de vivre sera différente des autres villes et tant que nous serons capables de refléter ces différences dans l'organisation de notre ville, Montréal va demeurer un centre intéressant et agréable à habiter », affirmait-il dans la revue Vie des Arts. Selon lui, « l'appréciation d'une ville commence par l'appréciation des gens qui l'habitent ».

Aujourd'hui comme hier, l'esprit de Montréal, ce n'est pas la concurrence ni l'excellence à tout prix. Montréal n'a jamais été premier de classe, plutôt un étudiant ouvert et curieux avec qui tout le monde désire se lier.

Montréal a beaucoup de qualités, mais aussi pas mal de défauts. Et ces derniers font autant son charme que les premières. Son côté bordélique, latin, chaotique lui donne un caractère unique parmi les agglomérations nordiques, en général très organisées. Entre fleuve et montagne, la cohabitation de la laideur et de la beauté, de l'histoire et de la modernité, est un peu son ADN.

L'esprit de Montréal, c'est aussi sa qualité de vie, ses loyers abordables, sa mixité linguistique, son éclectisme et son côté épicurien. Toutes les transformations de Montréal au cours de son histoire ne sont pas parvenues à lui enlever ce petit supplément d'âme qui la distingue de certaines métropoles aseptisées.

« De grandes villes sans défauts, cela relève de l'utopie », disait encore Charney, au début des années 70. On peut aimer sa ville, en être fier, tout en sachant qu'il est impossible qu'elle excelle sur tous les fronts.

Montréal est une ville, pas une marque. Elle n'a pas à porter le flambeau de l'excellence dans tous les domaines. Ni à « assumer un rôle de leadership sur la scène internationale », comme le veut le maire. L'enthousiasme d'un maire, c'est beau. Une vision d'avenir, c'est encore mieux. Entre sa volonté de ramener le baseball professionnel et son ambitieux projet de ville intelligente et numérique, M. Coderre enfonce le même clou : « C'est à Montréal que ça se passe ! »

La réalité, c'est qu'il se passe aussi bien des choses à New York, à Mexico ou à Tokyo. Et ces villes ne seront jamais comparables à Montréal.

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