Tout de même curieux. Les chauffeurs de taxi se sont plaints pendant des années du système qui les encadrait et les appauvrissait. Et aujourd'hui, ils se font les défenseurs acharnés du statu quo.

« Surtout, surtout, ne touchez à rien... sinon, on casse tout ! »

Heureusement, après une valse-hésitation, le gouvernement Couillard a choisi de se ranger du côté de la flexibilité, du changement, de l'ouverture d'esprit. Car voilà ce que commande la nouvelle économie : de l'adaptabilité.

Pas parce que c'est « jeune et cool », non. Plutôt parce que l'évolution technologique l'exige. Parce que les consommateurs la réclament. Parce qu'elle apporte son lot d'avantages. Et parce que le changement a lieu, qu'on le veuille ou non.

Libre à nous de l'adapter à nos conditions locales... ou de tenter vainement de figer le temps présent.

L'entente avec Uber dévoilée hier prend le parti de la souplesse. Et du coup, elle montre que le gouvernement d'une province a le pouvoir d'imposer son modèle aux multinationales qui s'installent ici... même quand elles le font avec autant d'arrogance qu'Uber.

Car ne nous méprenons pas : ce n'est pas Uber Canada qui a dit oui à Laurent Lessard, c'est la maison mère d'Uber Technologies, Inc., à San Francisco. Preuve que le Québec peut ouvrir la porte aux géants de la mondialisation, tout en se tenant debout.

Le gouvernement a ainsi réussi à inventer un « modèle québécois ». Un modèle qui s'appuie sur un grand principe : une classe de permis pour tout le monde (le fameux 4C), mais des règles différentes sur le terrain, afin d'accommoder divers modèles d'affaires.

Le défi était d'aplanir le terrain de jeu pour que tous participent de façon équitable, à la fois d'un point de vue fiscal, réglementaire et concurrentiel.

C'est là que le gouvernement s'est fait innovant : en exigeant que chacun paye sa juste part et reçoive en contrepartie certains droits exclusifs.

Uber a ainsi le droit de circuler partout, sans égard aux « zones » habituelles. Mais pour ce faire, elle doit payer une redevance salée. On demande 6 cents à Edmonton, 11 cents à Ottawa et 30 cents à Toronto. Mais au Québec, on a fait grimper la somme à 90 cents... alors qu'Uber proposait de payer neuf fois moins !

À cela s'ajoute un tarif minimum de 3,45 $ la course, une limite à la modulation tarifaire et le prélèvement des taxes à la source auprès de ses milliers de chauffeurs. Une série d'obligations qui, mises ensemble, élimineront l'avantage indu dont profitait Uber jusqu'ici.

Quant aux taxis, forts de leurs permis, ils auront droit à un fonds de modernisation, et ils conserveront un accès exclusif à l'aéroport, aux postes d'attente, aux contrats gouvernementaux, au transport adapté ainsi qu'aux clients qui hèlent.

Mais bon, même dans ces conditions, Uber est de trop dans le marché, de l'avis des chauffeurs de taxi. Tout comme l'était à une autre époque le BIXI, rappelez-vous. Car2Go aussi d'ailleurs, ainsi qu'Auto-mobile, Communauto, la navette 747...

Or, n'en déplaise aux nostalgiques, la technologie évolue... et personne n'a encore trouvé le bouton pause.

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