Le coup d'envoi des élections municipales du 3 novembre a été donné vendredi dernier. Les principaux candidats étant maintenant connus, la section Débats de La Presse lance aujourd'hui une nouvelle tribune afin qu'ils détaillent leurs engagements. Chaque lundi jusqu'au 3 novembre, les chefs de Projet Montréal, Coalition Montréal et Équipe Coderre seront ainsi invités à répondre à une question précise portant sur les principaux enjeux municipaux.

Premier thème imposé, la congestion. Un problème qui gagne en intensité chaque année dans la métropole en raison de l'augmentation du parc automobile, mais aussi des répercussions du sous-financement dont ont souffert les infrastructures de transport du milieu des années 70 jusqu'aux années 90.

Le problème se fait sentir autant sur les routes, où se multiplient les chantiers inopinés et les interventions d'urgence, que sur le réseau de transport en commun, où les pépins sont plus nombreux que les places vides...

Le tout à l'auto des années 60 est peut-être derrière nous, mais les effets de cette approche d'une autre époque se font toujours sentir. Nous avons donc demandé aux candidats comment ils comptent décongestionner les artères de la métropole une fois à la mairie.

Le poing sur la table !

Richard Bergeron

Chef de Projet Montréal

Tous se plaignent de l'augmentation de la congestion à Montréal. Mais quelle en est la cause? Suivant les enquêtes Origine-Destination de l'Agence métropolitaine de transport, le parc automobile de la région métropolitaine a progressé d'un quart, soit de 355 000 véhicules au cours de la décennie 1998-2008.

Devant pareille progression de la motorisation, deux avenues sont possibles.

La première consiste à investir dans l'expansion du réseau autoroutier. C'est ce qu'a fait le gouvernement du Québec avec les prolongements récents de l'A-25 et de l'A-30, avec l'annonce du prolongement prochain de l'A-19, ou encore avec les 3,7 milliards de dollars annoncés pour augmenter la capacité de l'échangeur Turcot. Persister dans cette voie signifie que le parc automobile continuera de croître de 35 000 unités par année... si bien que la congestion atteindra indéfiniment de nouveaux sommets.

L'autre avenue consiste à investir dans des transports collectifs attrayants et performants - métro, tramway moderne, autobus en site propre - que les automobilistes eux-mêmes vont préférer à leur véhicule personnel lors de leurs déplacements domicile-travail, voire pour l'essentiel de leurs déplacements. Le scandale, à cet égard, est que Québec n'a pas prolongé le métro sur l'île de Montréal depuis mars 1988, il y a plus de 25 ans.

Les transports collectifs ne sont viables qu'en ville centrale, où existe un minimum de densité d'occupation du territoire. À l'opposé, l'auto convient aux banlieues de faible densité. En choisissant d'investir massivement dans l'expansion du réseau autoroutier, en même temps qu'il reporte continuellement tout projet majeur de transport collectif, Québec choisit en fait de développer les banlieues au détriment de Montréal. Et ça fonctionne! En effet, les banlieues entourant Montréal voient chaque année leur population augmenter de 30 000 habitants, dont les deux tiers proviennent de Montréal.

Il est grand temps que Montréal ait un maire qui mette le poing sur la table et dise à Québec: à partir de maintenant, c'est le développement de la métropole du Québec, prenant appui sur des transports collectifs attrayants et performants, qui sera la priorité.

Si la population me fait confiance, je serai ce maire qui mettra le poing sur la table.

Photo archives La Presse

Richard Bergeron, chef de Projet Montréal.

Sur plusieurs fronts

Denis Coderre

Chef de l'Équipe Denis Coderre

Il n'y a pas de solution miracle à la congestion des routes. Cela dit, on peut travailler sur plusieurs fronts à la fois.

• Évidemment, il faut améliorer le réseau de transport collectif. Nous proposons d'augmenter à 370 le nombre de kilomètres de voies réservées (incluant les SRB sur certains grands axes) et d'en accélérer l'implantation en misant sur les projets utilisant le réseau autoroutier;

• Nous voulons également optimiser les réseaux actuels en les complétant (ligne bleue vers Anjou et ligne orange vers Bois-Franc, réseau cyclable, Cavendish) et en les connectant (pôles intermodaux, stationnements incitatifs).

• Il faut poursuivre et accélérer le déploiement des systèmes de transport intelligents (centres de contrôle, panneaux à messages variables, gestion à distance des feux de circulation, etc.), qui aident à gérer la fluidité de la circulation et auxquels pourra s'intégrer le projet IBus de la STM, qui vise, entre autres, à accorder la priorité aux autobus aux intersections.

• Étant donné l'état de nos infrastructures, les chantiers de construction sont un mal nécessaire. On peut toutefois s'assurer d'une coordination plus efficace entre les travaux effectués par le Service de l'eau (égouts et aqueducs) et ceux effectués par la voirie, de façon à profiter des travaux souterrains pour moderniser les infrastructures de surface et éviter un dédoublement de chantier.

• On estime qu'entre 20 et 30 % des voitures qui circulent au centre-ville sont à la recherche d'un endroit où se garer. En implantant un système de stationnement intelligent, relié à une application qui informerait de la disponibilité des espaces partout où le stationnement est tarifé, on éliminerait une bonne partie de cette circulation inutile.

• Tandis que nos routes asphaltées sont congestionnées, le fleuve Saint-Laurent n'est utilisé que pour le transport de marchandises et les plaisanciers. Pourtant, le transport de travailleurs par bateau se fait à plusieurs endroits dans le monde. Nous proposons donc de reprendre l'étude du projet de navette en provenance de la Rive-Sud, et également de développer un circuit de navettes fluviales de l'est de l'île jusqu'au centre-ville.

PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, LA PRESSE

Denis Coderre, candidat à la mairie de Montréal.

Une meilleure coordination

Marcel Côté

Chef de la Coalition Montréal - Marcel Côté.

À l'heure de pointe, il faut ultimement diminuer le nombre de voitures en améliorant le service de transport en commun. À court terme, les SRB sur voies réservées offrent un potentiel intéressant. Pour se préparer aux travaux de Turcot, nous aménagerons des corridors alternatifs qui permettront de se rendre à l'aéroport en moins de 30 minutes à partir du centre-ville, et dont l'accès pourra être étendu à tous les quartiers de l'Ouest. Il suffit d'avoir de la détermination et d'investir dans le contournement des points chauds.

Par ailleurs, nous serons aussi vigilants près des points chauds structurels, tels que l'entrée du pont Jacques-Cartier, pour éviter que des travaux diminuent la fluidité de la circulation. Les autorités new-yorkaises ont d'ailleurs élaboré de bonnes pratiques en la matière dont nous pourrions nous inspirer.

Hors des heures de pointe, il s'agit principalement d'un problème chronique de gestion des points chauds, surtout au centre-ville.

D'une part, il faut exiger une meilleure coordination entre les Travaux publics et la Division de la circulation, qui contrôle les feux et qui devrait les moduler lors d'obstructions temporaires. Cela devrait se faire efficacement et sans complication. D'autre part, il faudra envisager, exceptionnellement, de ne permettre les travaux qu'en soirée ou durant la nuit aux endroits très sensibles.

La congestion routière est le résultat de choix non coordonnés de plusieurs acteurs. La Ville peut être plus proactive pour les influencer et, dans certains cas, faire elle-même ces choix. La mauvaise gestion actuelle entraîne des coûts importants, tant sur le plan économique (perte de temps, de productivité, etc.) que sur le plan écologique.

À cet égard, il faut clarifier l'imputabilité au sein des structures de la Ville et mieux répartir les responsabilités entre les directions des transports et les services de la circulation. En particulier, les Travaux publics ont une trop grande influence et ne sont pas suffisamment sensibles aux impacts de leurs décisions sur la circulation. Il faut mieux gérer ces équilibres afin d'offrir un meilleur service aux citoyens. C'est ce que nous ferons dès que nous serons élus.

PHOTO ROBERT SKINNER, LA PRESSE

La chef de Vision Montréal, Louise Harel, a assuré que son parti continuerait d'exister et qu'il ne s'agissait que d'un moyen pour renforcer l'alliance entre son équipe et celle de Marcel Côté.

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