Ne nous mentons pas à nous-mêmes. La saison de hockey reprendra dans quelques jours et du coup, la frustration accumulée se dissipera dans les gradins et devant la télévision, au gré des matchs et des séries.

Les profondes séquelles que laissera ce conflit de travail, la difficulté qu'auront les équipes à renouer avec leurs fans, la colère des partisans qui ont fini par jeter leur dévolu sur d'autres sports sont autant d'impacts possibles, mais dont on exagère fort probablement l'ampleur.

Que les partisans soient frustrés, il n'y a aucun doute là-dessus. Ils ont suivi les tribulations du lock-out avec un mélange d'incrédulité et de dégoût, avec cette impression, tout à fait fondée, qu'ils ont été sacrifiés par cupidité, qu'ils ont été les otages impuissants d'un conflit qui a duré bien trop longtemps.

Mais parions que ces sentiments laisseront vite place à l'incroyable clémence des partisans qui, une fois de plus, seront happés par l'excitation du jeu, des échanges et des rivalités, gardant simplement un souvenir amer de ce lock-out dont ils ont fait les frais.

Dans le fond, tout ce qu'ont perdu les joueurs et les propriétaires dans ce conflit, c'est leur crédibilité (en plus de quelques millions...). Rien pour miner la popularité du sport auprès des partisans pour qui, déjà, la ligue carbure trop à l'argent.

Si les propriétaires ont choisi d'étirer l'élastique aussi loin sans crainte qu'il leur éclate à la figure, c'est qu'ils se doutent bien que les partisans sont magnanimes à la limite de la bonasserie, surtout au Canada.

Vrai qu'aux États-Unis, la fidélité des partisans sera davantage mise à l'épreuve. Mais la frustration, si elle persiste, risque moins d'être dirigée contre les équipes locales que contre «la ligue» ou, mieux, contre le formidable paratonnerre qu'est Gary Bettman...

On rêve certes d'excuses publiques, d'une repentance qui se traduise en gestes concrets et audacieux en faveur des fans (l'ancien joueur Chris Nilan propose par exemple que le premier match de la saison soit gratuit). Mais qu'elles surviennent ou non, les parties vont recommencer, les habitudes vont reprendre, et la colère s'estompera graduellement, aidées par la durée de la nouvelle convention collective et par les formidables machines de marketing que sont devenues les équipes sportives professionnelles.

Certes, les propriétaires devront séduire les annonceurs, ils devront courtiser les diffuseurs, ils auront à gagner le coeur des partisans et à multiplier les journées thématiques pour les remercier de leur fidélité. Mais n'est-ce pas déjà ce qu'ils faisaient, avec beaucoup d'efficacité d'ailleurs?

Les amateurs finiront donc par passer l'éponge sur ce conflit, comme ils l'ont d'ailleurs fait pour les précédents. Certains resteront fâchés, certains seront allés voir ailleurs, mais dans l'ensemble, ils continueront d'applaudir parce que leur amour ne pas va tant aux joueurs et aux équipes qu'au sport qu'ils pratiquent.

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