En mettant une croix sur Gentilly-3, en 1976, le Parti québécois freinait les ambitions nucléaires de la province. Trente ans plus tard, voilà qu'il a l'occasion de mettre fin au programme nucléaire du Québec, une fois pour toutes.

Pauline Marois, en effet, a promis en campagne électorale de fermer l'unique centrale de la province, Gentilly-2. Un engagement censé, qu'elle aurait tout intérêt à honorer.

La réfection de Gentilly est un cauchemar en devenir. Non pas pour les raisons de santé et de sécurité invoquées dans le documentaire Gentilly or not to be, mais pour les énormes risques financiers qu'elle ferait courir aux Québécois.

Déjà, avant même que le chantier soit lancé, la facture des travaux a bondi de 1,4 à 2 milliards, possiblement 3 milliards! Et si la rénovation de la centrale Pointe-Lepreau (Nouveau-Brunswick), en tout point identique à Gentilly-2, est garante de ce qui attend le Québec, il faudra ajouter à cela bien des retards, des pépins et... des coûts supplémentaires dépassant le milliard!

Différence de taille entre le Québec et sa voisine, toutefois: les dépassements de coût, là-bas, sont refilés à Énergie atomique Canada; au Québec, ils seraient plutôt à la charge d'Hydro-Québec et donc, de ses actionnaires...

Un tel risque, à la limite, pourrait être jugé acceptable si le projet était essentiel. Mais ce n'est pas le cas de la réfection de Gentilly-2, une centrale qui ne fournit pas plus de 3% de l'électricité de la province. Rien qui ne peut être compensé par un bon plan de transition, surtout dans un contexte de surplus énergétique.

Vrai que la présence d'une centrale dans le sud de la province est nécessaire pour stabiliser le réseau, étant donné la distance entre les lieux de production et de consommation. Mais ce rôle pourrait être joué par la coûteuse centrale au gaz de Bécancour, inutilisée depuis des années. Le recours ponctuel à une centrale thermique serait moins dommageable que les déchets radioactifs produits par Gentilly, une fois rénovée.

Plutôt que de se relancer dans l'aventure nucléaire et ainsi préserver une expertise qui n'a plus grande utilité, le futur gouvernement devrait donc miser sur le déclassement de Gentilly. Et ainsi, créer une expertise et des centaines d'emplois dans une industrie qui a le vent dans les voiles avec la fermeture prévue de nombreuses centrales dans le monde.

Certes, le déclassement coûterait, aussi, très cher. Mais cette facture, si on ne l'assume pas aujourd'hui, on la refilera aux générations futures. Avec un paquet de déchets nucléaires supplémentaires dont on ne sait toujours que faire.

Si les arguments scientifiques ne permettent pas de conclure à la nécessité de fermer Gentilly, les risques économiques et le contexte énergétique de la province devraient inciter le gouvernement du PQ à mettre une croix sur le nucléaire. Comme il l'a fait en 1976.

---

Ceci est le second de deux éditoriaux sur l'avenir de Gentilly-2. Lisez également «La peur de l'atome»



Qu'en pensez-vous? Exprimez votre opinion